Page:Richepin - Les Blasphèmes, 1890.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
30
LES BLASPHÈMES

Tout est fini. Tout gît dans un obscur silence.
Le cadavre du monde est en proie au néant.

*


Hélas ! à quoi bon cette envie ?
En vain le désir fou te mord
De t’évader hors de la vie :
On ne peut pas trouver la mort.
Partout la vie est répandue.
Aussi loin que va l’étendue,
Cherche comme une enfant perdue
Cette mort que ton cœur rêva ;
Partout, de l’astre à l’étincelle,
Partout la vie universelle
Se fond, tourbillonne et ruisselle,
Et tout passe et rien ne s’en va.

La vie elle-même s’enfante.
La mort n’est qu’un éclair qui joint
Une existence à la suivante.
On se transforme, on ne meurt point.
Vois-tu cette vague inconnue !
Demain, qu’est-elle devenue ?