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LES BLASPHÈMES

De revivre un jour de leur vie
Et d’habiter leurs anciens corps ;

Et sous leurs formes incomplètes
Je voyais dans chaque sillon
Grouiller en blême tourbillon,
Ce fourmillement de squelettes.

Semblant se complaire à leur vœu,
Là-haut le soleil rouge, âpre, ivre,
Pour que ces morts pussent revivre,
Versait du sang, versait du feu,

Et sous l’abominable averse
Germaient en fleurs le long des os
Les artères aux bleus réseaux,
Les muscles qu’un frisson traverse,

Les nerfs et les tendons bandés
Comme des cordes de machine,
Tant qu’enfin sur leur maigre échine
Tous se dressèrent enviandés.

Avec un sourd effort la plaine
Suait, se tordait, étouffant,