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blé, qui, à 2 sch. d’augmentation par quarter, donneront 200 l., et cependant, l’impôt étant assis d’une manière égale sur l’une comme

    cuse d’abord et j’ajoute que les nations ne doivent pas souffrir de l’impuissance des législateurs, ne peuvent pas se contenter de cette fin de non-recevoir, et qu’elles ont droit d’attendre autre chose de ceux à qui elles remettent le soin de les gouverner. Comment ? il serait impossible de proportionner le droit sur le vin à la fortune de celui qui le consomme ! Mais que fait-on donc à la frontière pour distinguer nettement entre les graisses de cheval, d’ours, de bœuf, entre les dix ou douze espèces de poils qui paient tribut à la protection ? Les douaniers sont-ils doués d’une science universelle en fait de produits, et sauraient-ils classer à l’odorat telle ou telle qualité de graisse, comme un courtier de thés, en Chine, classe par la dégustation les innombrables variétés de cette plante ? Eh bien ! ce qu’on fait pour ces produits et pour tant d’autres, il serait très-facile de le faire, par exemple, pour les vins. Outre que les vases qui les contiennent affectent des formes très-variées, suivant l’origine et la qualité, formes auxquelles la consommation est habituée et qui, pour les vins du Rhin, le Champagne, le Tokay, sont devenues traditionnelles, il est un moyen bien simple ; — en dehors de l’entrée en tonneaux qui a ses inconvénients, — c’est de prélever le droit ad valorem sur le montant des factures ou des lettres de voiture. Le procédé, comme on voit, n’a rien de révolutionnaire, rien d’inquisiteur, et il trouverait une garantie puissante dans la pénalité redoutable qui s’attache à toutes les fraudes commises au préjudice du trésor. Ce serait là une réforme transitoire en attendant le moment où, balayées par le souffle du progrès, les barrières de l’octroi tomberaient avec celles de la douane aux applaudissements de tous. Je ne veux pour garants de ces applaudissements, que les passages lumineux que M. Horace Say a consacrés à ce problème des octrois dans ses belles Études sur l’administration de la ville de Paris*.

    Renoncer aux magnifiques recettes que font les caisses municipales avec leurs droits d’entrée, est quelque chose qui peut paraître aussi utopique qu’héroïque : mais il faudra bien y venir le jour où les idées que nous venons d’émettre, et que couvre la sanction de maîtres illustres, auront fait irruption dans l’esprit public ; d’ici là il faudra ramener peu à peu les droits sur les denrées de première nécessité à des tarifs qui semblent légers, même aux plus pauvres : d’ici là il faudra faire violence au trésor, par le raisonnement, pour lui faire adopter ces tarifs modérés, qui seraient son honneur et sa richesse s’il savait s’en servir. Et comme les améliorations s’enchaînent, comme le bien a sa logique ainsi que le mal, la nécessité d’alléger le fardeau qui retombe sur les classes pauvres, conduira à la nécessité de diminuer l’ensemble des charges publiques ; de désarmer ces légions de soldats qui sont un véritable anachronisme à une époque où triomphent les théories de la paix ; d’arracher de nos dépenses toutes les branches gourmandes, de nos industries tous les monopoles, de notre régime

*. Paris, 1846. Guillaumin, Éditeur,