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REVUE GÉNÉRALE

LA PSYCHOLOGIE CRIMINELLE


I caratteri dei delinquenti, par Marro (Roma-Torino-Firenze, Fratelli Bocca, 1887). — Dinamica del delitto, par Battaglia (Napoli, Battaglia, 1886). — Nuova scienzia penal, par Felix de Aramburu y Zuloaga (Madrid, 1897). — L’Homme criminel, traduction française de l’Uomo delinquente de Lombroso, sur la 4e édition italienne. — Compte rendu officiel de la justice criminelle en France, pour 1885. — Manuel des expertises médicales, par Henri Coutague (Storek, Lyon).

I. — L’intérêt que le public philosophique paraît prendre aux questions de criminalité et de répression pénale, et qui ne s’attiédit pas, aurait lieu de surprendre, si l’on ne songeait qu’aux traits repoussants des criminels. Mais il faut se garder de confondre cette curiosité, même passionnée, avec la passion toujours croissante des masses populaires pour les débats de cours d’assises. Aux yeux du peuple, un beau crime est un roman vécu, et un grand criminel garde encore cet air romanesque dont la littérature de 1830 l’avait doué. Tout autre il apparaît aux lecteurs de nos anthropologistes : être dégradé, hideux, monstre ou avorton moral qu’il convient d’exterminer sans indignation ni pitié, sans haine ni scrupule. Aussi n’est-ce pas lui qui intéresse à présent les esprits sérieux, mais bien la gravité des problèmes qu’il suscite, la difficulté d’expliquer son apparition, de prévenir sa réapparition, de concilier avec le déterminisme scientifique sa responsabilité, de justifier ou de rectifier les arrêts de la conscience universelle à son égard par l’intervention d’une autorité, s’il en est, supérieure à la conscience universelle. De là une anxiété de raison, qui, sans avoir rien de commun avec l’émotion plus ou moins malsaine causée par les exploits d’un Pranzini, est aussi intense et plus durable.

Une question de fait domine toujours ce genre de recherches : celle de savoir si la prépondérance appartient aux causes naturelles ou aux influences sociales dans la production du délit. Des investigations, des spéculations les plus récentes à ce sujet, il se dégage, si je ne m’abuse, un courant chaque jour plus marqué vers l’interprétation sociologique des faits délictueux. Les socialistes se sont lancés à corps perdu dans cette voie : Colajanni, par ses beaux travaux sur la criminalité en Sicile, sur l’alcoolisme, etc., dont nous avons rendu compte ; Battaglia, un nouvel écrivain, par sa Dinamica del delitto,