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Nous pouvons nous borner à l’étude de ce type de fécondation ; c’est le plus simple de tous, et on peut y ramener les autres sans trop de difficulté. Ce qui complique le processus chez d’autres espèces, ce sont d’abord les modifications successives par lesquelles passe l’ancien noyau avant de se résorber. Chez le Stentor coeruleus, le noyau a la forme d’un long chapelet ; au moment de la fécondation, les grains de ce chapelet se séparent et se répandent dans le protoplasma où ils finissent par se résorber. Chez les Paramécies, le phénomène se présente encore autrement ; le noyau, d’abord ramassé, s’allonge en un très long cordon qui se brise, et ses fragments, éparpillés dans le protoplasma, se résorbent.

On voit que dans tous les cas la fécondation comporte une fragmentation et une disparition de l’ancien noyau qui est remplacé par un nouveau noyau résultant de la transformation du noyau d’attente émané d’un autre organisme.

Les modifications diverses présentées par ce noyau d’attente contribuent aussi pour une large part à la complexité du phénomène. Nous avons vu que chez le Chilodon le noyau d’attente se segmente en deux globules, dont l’un constitue le noyau nouveau et l’autre le noyau d’attente nouveau. Les choses se passent différemment chez les Paramécies. Chez le Paramecium bursaria, par exemple, le noyau d’attente se divise en deux, puis en quatre capsules ; une de ces capsules se résorbe, une seconde devient le noyau d’attente, et les deux autres se fusionnent avec ce qui reste de l’ancien noyau pour former le noyau principal. Chez le Paramæcium aurelia, la division se fait en huit capsules ; trois sont éliminées ; parmi les cinq capsules qui survivent, il en est quatre qui sont destinées à former le noyau principal nouveau ; en effet, chaque Paramécie se segmente d’abord en deux, puis en quatre, et chacun des quatre individus acquiert une des capsules. Quant à la cinquième capsule, elle est destinée à former les noyaux d’attente de ces organismes ; aussi se divise-t-elle en deux, puis en quatre, c’est-à-dire autant de fois que le corps de l’animal.

Il n’est pas douteux, à notre sens, que la conjugaison est un phénomène sexuel ; ce qui l’atteste tout d’abord, ce sont les manœuvres singulières que les animalcules exécutent avant de se s’y livrer ; ces manœuvres sont absolument comparables au rut chez les animaux supérieurs. Mais nous reviendrons plus loin sur la signification physiologique de la conjugaison, quand nous essayerons de définir, d’après les expériences les plus récentes, la fonction du noyau dans la cellule.

On peut se demander quel est le point de départ, l’excitant de ces