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d’inquiétude et de malaise, de tension telle qu’un corps qui tombe, un accident de laboratoire amènent une réaction automatique.

Quand l’impression attendue est bien déterminée, l’innervation motrice a sa voie tracée d’avance ; au lieu d’être diffuse, la tension est localisée. Le temps de la réaction peut devenir nul et même négatif.

Quand la réaction doit être faite par des procédés différents ou pour des excitations différentes, il faut qu’il se produise un changement dans les centres qui produise un changement dans la direction des voies nerveuses : c’est un état très fatigant. Si l’on s’obstine à réagir, le temps grossit démesurément, jusqu’à une seconde, d’après Exner[1].

On voit donc que l’attention ne ressemble en rien à un « acte pur » qu’elle est liée à des conditions physiques parfaitement déterminées, n’agit que par elles et dépend d’elles. Il nous reste à examiner ses formes morbides et à voir ce qu’elles nous apprennent, ce qui fera l’objet d’un article ultérieur.

Th. Ribot.

  1. Cet article était imprimé quand nous avons reçu un très intéressant mémoire de M. N. Lange (de Saint-Pétersbourg) publié dans les Philosophische Studien (tome IV, fasc. 3) sur « l’attention sensorielle et l’aperception active ». L’auteur, qui insiste avec beaucoup de force sur l’élément moteur, a fait des recherches expérimentales sur les oscillations de l’attention sensorielle : par exemple, en écoutant dans le silence de la nuit le tic-tac d’une montre, on constate que parfois il disparaît, parfois il semble renforcé. D’après M. Lange, ces oscillations sont dues à l’image mentale qui s’ajoute à l’impression réelle ; en sorte que pour lui l’état d’attention sensorielle consiste en une assimilation, une fusion de ces deux éléments, le premier seul étant variable.