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LE MÉCANISME DE L’ATTENTION[1]


II. — L’ATTENTION VOLONTAIRE.

L’attention volontaire ou artificielle est un produit de l’art, de l’éducation, de l’entraînement, du dressage. Elle est greffée sur l’attention spontanée ou naturelle et trouve en elle ses conditions d’existence, comme la greffe la tient du tronc où elle a été implantée. Dans l’attention spontanée, l’objet agit par son pouvoir intrinsèque ; dans l’attention volontaire, le sujet agit par des pouvoirs extrinsèques, c’est-à-dire surajoutés. Ici le but n’est plus donné par le hasard ou les circonstances ; il est voulu, choisi, accepté ou du moins subi ; il s’agit de s’y adapter, de trouver les moyens propres à maintenir l’attention aussi cet état est-il toujours accompagné d’un sentiment quelconque d’effort. Le maximum d’attention spontanée et le maximum d’attention volontaire sont parfaitement antithétiques, l’une allant dans le sens de la plus forte attraction, l’autre dans le sens de la plus forte résistance. Ce sont les deux pôles, entre lesquels il y a tous les degrés possibles avec un point où, au moins en théorie, les deux formes se rejoignent.

Quoique l’attention volontaire soit à peu près la seule que les psychologues aient étudiée et que pour la plupart d’entre eux elle soit toute l’attention, son mécanisme n’en est pas mieux connu. Pour essayer de l’entrevoir, nous nous proposons de rechercher d’abord comment se forme l’attention volontaire, d’en retracer la genèse ; ensuite nous étudierons le sentiment d’effort qui l’accompagne et enfin les phénomènes d’arrêt ou d’inhibition qui, selon nous, jouent un rôle capital dans le mécanisme de l’attention.

I

Le procédé par lequel l’attention volontaire se constitue est réductible à cette unique formule : Rendre attrayant par artifice ce qui

  1. Voir le numéro précédent de la Revue.