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nécessité d’un orifice buccal par lequel l’aliment puisse pénétrer dans l’intérieur du protoplasma.

Ici encore on observe une curieuse gradation de phénomènes. Il existe tout d’abord des êtres dépourvus d’une bouche préformée et permanente ; la bouche est adventice ; elle se forme au moment du besoin ; ce qui fait la supériorité de ces êtres sur les précédents, c’est que la bouche se forme toutes les fois à la même place.

À cet égard, on peut étudier un petit Infusoire flagellé qui est abondant dans les eaux impures, le Monas vulgaris. Il porte, à son extrémité antérieure, un long flagellum qui au repos est replié contre le corps. À la base de ce flagellum, le protoplasma fait une saillie de substance claire, en forme de lèvre. Cette proéminence est creusée d’une vacuole remplie de liquide. Cienkotvski a décrit comment ces divers organes entrent en fonction. Les Bactéries et les Micrococcus, qui servent de pâture au Monas, sont amenés à coups de flagellum dans son voisinage ; à ce moment l’animal a conscience de la proximité de ces corps ; car, alors, la proéminence qui est à la base du flagellum s’allonge vers le corpuscule, l’englobe dans sa substance et l’entraîne à sa suite dans l’intérieur du corps de la Monade. Bütschli a fait une observation analogue sur le Oikomonas termo.

L’acte de préhension de l’aliment comprend ici trois phases, dans deux desquelles l’animal manifeste son activité psychique : 1o rapprochement de la nourriture au moyen du flagellum ; 2o formation de la vésicule qui va au-devant de l’aliment, quand celui-ci se rapproche ; 3o absorption de l’aliment.

Les Acinètes sont des êtres peu mobiles ; ils restent souvent toute leur vie fixés à un pédicule. Ils ne présentent pas de cils, mais des prolongements rayonnants plus ou moins nombreux, épars ou groupés en touffes. Ces filaments sont des suçoirs, pourvus à leur extrémité d’une petite ventouse. Lorsqu’un imprudent Infusoire nage à proximité d’une Acinète, celle-ci l’arrête au moyen de ses filaments tendus, et applique sur son corps l’extrémité cupuliforme de ses suçoirs qui font le vide. Le protoplasma du Cilié ainsi capturé coule lentement à travers les suçoirs, comme à travers des tubes, et s’accumule dans l’intérieur de l’Acinète, sous forme de gouttelettes. Ainsi, chez l’Acinète, des organes définis sont appropriés à la préhension et à l’absorption de la nourriture. Parallèlement, l’acte psychique nécessaire à la préhension est devenu plus complexe que chez l’Amibe. L’Acinète doit diriger son suçoir vers l’infusoire qui est à sa portée, et par conséquent, il faut que l’animal apprécie la position de sa proie.

Il y a des Acinétiens qui présentent des organes de préhension