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BINET.la vie psychique des micro-organismes

ment expliquer l’existence et surtout la genèse de cet appareil digestif qui ne fonctionne pas ?

C’est si bien la présence de chromatophores qui empêche certains Flagellés de se nourrir comme des animaux, que chez les Flagellés sans chromatophores, sans pigment chlorophyllien, comme le Peranema, l’appareil digestif fonctionne. Le Peranema est même un animal très vorace. Remarquons aussi que le Peranema ne présente pas de taches oculaires, comme l’Euglène verte ; et il n’en a du reste pas besoin, car il n’a pas besoin de rechercher la lumière pour fabriquer de l’amidon. Tous ces faits s’enchaînent.

Divers observateurs ont constaté l’influence de la lumière sur les organismes verts des deux règnes. Un certain degré de lumière les attire, un degré plus considérable les repousse. M. Strasburger a fait il y a quelques années des expériences suivies sur les mouvements des spores vertes vers la lumière. On a même vu que, dans l’intérieur des cellules, les grains de pigment exécutent des mouvements et s’orientent sous l’influence des radiations solaires.

2o La nutrition par endosinose, ou saprophytique. L’être se nourrit en absorbant par toute la surface de son corps les liquides contenant des produits de décomposition de végétaux ou d’animaux. Les êtres saprophytiques se rencontrent dans les eaux putrides ou dans les infusions. Ce mode de nutrition peut être considéré, au point de vue qui nous occupe, comme le plus simple de tous ; il comporte peut-être une recherche de la nourriture, mais il n’y a point de mouvements appropriés pour amener la nourriture dans un appareil digestif quelconque.

3o Il existe enfin un dernier mode de nutrition, dont nous nous occuperons d’une façon toute spéciale ; c’est la nutrition animale, par laquelle un Micro-organisme ingère des particules alimentaires solides et se nourrit comme un animal, soit à l’aide d’une bouche permanente, soit à l’aide d’une bouche adventice, qui s’improvise au moment du besoin. Ce mode de nutrition est celui de tous les animaux supérieurs. Parmi les êtres inférieurs, on le rencontre chez la plupart des Infusoires, beaucoup de Mastigophores, les Sarcodines, etc. Chez les Micro-organismes appartenant au règne végétal, on trouve la nutrition par endosmose, la nutrition chlorophyllienne, mais jamais la nutrition animale ; les Protophytes n’ont jamais de bouche et n’absorbent jamais d’aliments solides.

La nutrition animale exige, chez les êtres qui s’y livrent, des facultés psychologiques très remarquables. Ces phénomènes, dont nous allons suivre la complexité croissante en partant des Protozoaires les plus simples et en arrivant aux Protozoaires supérieurs, prouvent