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même temps dans le même sens ; et cette harmonie est nécessaire, car la moindre contrariété dans leurs mouvements suffirait pour briser le faible lien qui les réunit. De plus, leurs cils vibratiles battent à l’unisson. Pour expliquer cette concordance entre les mouvements des deux animaux, Gruber suppose que toute la masse de leur protoplasma joue le rôle d’un système nerveux diffus, qui a pour effet de régulariser leurs mouvements et de les faire concorder.

On pourrait ajouter que les Infusoires ne possèdent pas seulement un système nerveux diffus, mais qu’ils doivent posséder des centres nerveux spéciaux et doués de propriétés différentes.

On se rappelle en effet que, sous l’influence de certains agents toxiques, la mort n’est pas simultanée pour toutes les parties de l’organisme. Ce qui meurt le premier, ce sont les mouvements volontaires des gros cils ; les mouvements des cils fins peuvent persister plus longtemps ; et enfin, quand tous les cils sont devenus immobiles et rigides, on a vu encore la vésicule pulser pendant une heure. Cette mort successive rappelle ce que l’on observe chez les Vertébrés ; sous l’influence des agents toxiques, le cerveau meurt le premier, puis vient la moelle et en dernier lieu le bulbe, qui est l’ultimum moriens.

Les organes des sens. — Tous les Micro-organismes sont doués de sensibilité ; quelques-uns même, comme les Infusoires, ont une sensibilité exquise. Mais on n’a trouvé jusqu’ici que dans un petit nombre d’espèces des organes des sens anatomiquement différenciés. On considère en général les expansions protoplasmiques que nous avons décrites plus haut sous le nom de pseudopodes comme remplissant la fonction d’organes rudimentaires du tact qui avertissent le micro-organisme de la présence des objets qui se trouvent sur sa route ; mais ces pseudopodes, qui servent en même temps d’appareils moteurs, ne présentent aucune structure les destinant spécialement à la réception des impressions sensitives. Stein considère également les cils vibratiles comme des organes du toucher. Comme ce sont là des organes qui n’ont subi aucune différenciation, nous ne nous y arrêterons pas. Les Infusoires appartenant au genre Cryptochilum (Maupas) portent à leur extrémité postérieure une longue soie rigide, que M. Maupas considère comme un organe de tact, destiné à avertir l’animal de l’approche des autres Infusoires.

Nous parlerons plus longuement de l’organe visuel ; ce point a été l’objet de nombreuses études, dont quelques-unes sont toutes récentes et intéressent au plus haut degré la physiologie et la psychologie générales. L’œil est de tous les organes des sens celui qui s’est