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BINET.la vie psychique des micro-organismes

mais le plus souvent, lorsqu’il s’en sert comme organe de préhension, il l’étend devant lui tout de son long ; la partie basilaire demeure complètement immobile et rigide, tandis que l’extrémité libre exécute seule des mouvements destinés à rabattre les aliments jusqu’à la bouche qui est en général située à la base du flagellum. Ehrenberg donnait au flagellum le nom de trompe ; sa singulière mobilité le rend digne de ce nom. Le flagellum est, comme le cil vibratile, une expansion du protoplasma à travers la membrane d’enveloppe. M. Certes a observé un Protozoaire dont le flagellum rentrait par moments dans la masse du corps avec laquelle il se confondait ; il était remplacé par un pseudopode qui bientôt s’effilait et prenait la forme d’un flagellum.

Bütschli a fait récemment sur cet organe moteur une observation intéressante. Dans certaines circonstances, les Péridiniens (Dinoflagellés) rejettent leur long flagellum et entrent à l’état de repos ; ils les régénèrent tout aussi facilement. Chez le Glenodinium cinctum, Bütschli a vu le flagellum s’enrouler d’abord en tire-bouchon, puis se détacher brusquement de l’animal ; devenu libre, il s’agite pendant plusieurs minutes dans le liquide avant de s’immobiliser[1]. Cette observation permet de répondre aux naturalistes qui prétendent que le cil vibratile est une dépendance de la cuticule, en se fondant sur ce fait que lorsqu’on isole de la cellule les cils avec le plateau de la cuticule où ils sont insérés, les cils continuent à se mouvoir ; on vient de voir que le flagellum se meut alors même qu’il est séparé de la cuticule ; cette persistance des mouvements s’explique d’ailleurs suffisamment par la nature protoplasmique des cils et du flagellum.

À un autre point de vue, l’observation de Bütschli nous donne un curieux exemple de ces phénomènes d’autotomie qui ont été étudiés dernièrement par Frédéricq.

Les pseudopodes, les cils vibratiles et le flagellum constituent les trois organes moteurs les plus répandus dans le règne des Protistes. On a en outre décrit chez les Infusoires des différenciations particulières du protoplasma, que l’on a pu comparer aux fibres musculaires des animaux supérieurs. Les Vorticelles sont portées sur des pédoncules contractiles. Ce sont des filaments susceptibles de s’enrouler en tire-bouchon quand l’animal est inquiété. Certains Infusoires peuvent modifier la forme de leur corps par une contraction brusque : on les a appelés métaboliques, tels sont les Stentors, les Prorodons, les Spirostomes. On a appelé, par opposition, amétaboliques, ceux qui ne changent pas leur forme, par exemple les Paramécies. D’après des

  1. Morphologische Jahrbuch (t.  X, 1885, p. 534).