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manifestations motrices ne sont ni des causes ni des effets, mais des éléments : avec l’état de conscience qui en est le côté subjectif, ils sont l’attention.

Que le lecteur ne prenne d’ailleurs ceci que comme une ébauche, une vue provisoire du sujet, qui sera complétée. Ainsi, nous ne parlons pas du sentiment de l’effort, parce qu’il est très rare dans l’attention spontanée, si même il se rencontre : mais le rôle des mouvements est d’une assez grande importance pour qu’on y revienne à plusieurs fois.

III

L’état de surprise ou d’étonnement est un grossissement de l’attention spontanée dont il convient de dire quelques mots. Quoique très fréquent dans la vie courante, il a été oublié par la psychologie. Je trouve cependant dans le Traité des passions de Descartes (2e partie, art.  70) la définition suivante : « L’admiration est une subite surprise de l’âme, qui fait qu’elle se porte à considérer avec attention les objets qui lui semblent rares et extraordinaires. Ainsi, elle est causée premièrement par l’impression qu’on a dans le cerveau qui représente l’objet comme rare et par conséquent digne d’être fort considéré ; puis, ensuite, par le mouvement des esprits qui sont disposés par cette impression à tendre avec une grande force vers l’endroit du cerveau où elle est, pour l’y fortifier et conserver comme aussi ils sont disposés par elle à passer de là dans les muscles qui servent à retenir les organes des sens en la même situation qu’ils sont, afin qu’elle soit encore entretenue par eux, si c’est par eux qu’elle a été formée. » Ce passage vaut la peine d’être médité. Si on le lit avec soin, on trouvera, en tenant compte de quelque différence de langage, que presque tous les éléments que nous nous sommes efforcé de montrer dans le mécanisme de l’attention spontanée, sont clairement énumérés : l’augmentation de l’influx nerveux à la suite de l’impression, sa dérivation partielle vers les muscles, l’action de ces muscles pour « entretenir » et pour « fortifier ». Notons que la manière de procéder de Descartes est celle de la psychologie physiologique, non celle de la psychologie spiritualiste, qui bien à tort se réclame de lui.

La surprise, à un plus haut degré l’étonnement, est un choc produit par ce qui est nouveau et inattendu : si, par exemple, une personne casanière, que je crois chez elle à deux cents lieues, entre brusquement chez moi.

Du côté mental, peu de chose à en dire. Elle appartient au groupe