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ANALYSES.l. barbera. Du calcul infinitésimal.

part, ce qui peut être une bonne spéculation, car le reste de l’ouvrage, purement mathématique, ne me paraît pas destiné à un grand débit.

C’est le quatrième volume de mathématiques que publie au reste M. Barbera depuis 1877 ; il a sans doute reconnu d’une façon péremptoire qu’il n’avait pas de vocation pour écrire sur la philosophie, quoiqu’il l’enseignât. Mais mon humble avis est qu’il s’est trompé en s’attaquant aux mathématiques ; il est né pamphlétaire.

Son Proemio est, somme toute, très intéressant comme document relatif à l’état du professorat dans les université italiennes ; j’admets qu’en parlant de ce sujet M. Barbera sait ce qu’il dit et dit ce qu’il sait ; ce n’est pas comme pour ce qui concerne la France, où il déclare que les deux citadelles des Simplicii sont l’École polytechnique, d’une part, l’Institut de l’autre (lisez l’Académie des sciences, car il s’agit en général de l’enseignement scientifique, en particulier de l’enseignement mathématique).

Il faut vraiment être bien peu au courant pour écrire pareille chose de l’Institut au moment des deux dernières élections de la section de mécanique. Certes, si MM. Boussinesq et Marcel Deprez descendent de Simplicio, l’atavisme n’est qu’un vain mot. Pourquoi aussi venir répéter, en les défigurant, les vieilles histoires sur Abel et Poncelet ? N’est-il pas bien connu de tous que le peu d’accueil qu’ont eu leurs premiers travaux ne peut être imputé qu’à un seul mathématicien, dont la compétence n’a jamais été mise en doute, au reste, par ceux qui ont eu à souffrir de sa négligence ? Et ce n’est nullement par étroitesse d’esprit que Cauchy n’a pas apprécié leurs travaux ; il ne s’en est pas occupé, parce que, surchargé de besogne, il faisait passer avant tout son œuvre personnelle ; tous ceux qui ont eu, à cette époque, affaire à lui comme rapporteur, ont subi le même retard. Et, en fin de compte, Poncelet n’a-t-il pas, lui aussi, été de l’Institut ? La récompense décernée à Abel s’est-elle fait attendre si longtemps ?

Qu’il y ait des Simplicii en France, et peut-être trop, nul doute ; mais la vraie raison en est dans la forte organisation administrative de notre pays. Il n’y a pas d’administration possible sans traditions, et, quand on défend la tradition, on peut être facilement traité de Simplicio, que ce soit ou non à juste titre. Mais si l’École polytechnique recrute quelques administrations, le mal est, certes, encore plus grand pour ce es qui lui restent étrangères ; et il faut ajouter, au point de vue spécial de l’enseignement scientifique, que la rivalité qui existe entre elle et l’Université est du plus heureux effet pour empêcher le triomphe du dogmatisme.

J’ai cru que ces remarques ne seraient pas déplacées ; mais est-il nécessaire d’expliquer dans cette Revue en quoi consiste réellement le travail mathématique de M. Barbera ? Je m’en dispenserais volontiers, mais je ne voudrais pas paraître redouter l’épithète malsonnante, dont il me gratifiera sans doute à mon tour.

Notre auteur critique, avec une verve assez entraînante, les méthodes