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Ces deux vers appliqués au temps sont assez larges :

L’horloge, suspendue aux éternels portiques,
Marque une heure immuable à l’immense univers.

Parlant des astres où l’homme incarnait autrefois les forces, le poète dit :

Nos sens ont inventé leurs beautés éternelles.
Leurs fantômes glacés peuplent le firmament.
Leur grâce et leur éclat naissent dans nos prunelles.

Il montre, dans la lutte pour l’existence, la nature écrasant l’être imparfait, et ces sombres batailles où

…celui qui dévore est l’élu du destin.

Dans la source il abaisse notre moi si fier à n’être

Rien qu’un vain souvenir dans une frêle image.

Il n’ignore pas que les sentiments, mieux que la froide raison, nous mènent

…à l’assaut de tous les hauts sommets.

Mais le sentiment, dans sa langue, est idéal, féconde illusion,

Indestructible espoir d’un bonheur inconnu.

Et nous voilà hors de la psychologie. Le sonnet est une fiole de pur cristal, où peut tenir une larme. Que cette larme vienne d’une émotion de notre intelligence ou de notre cœur, il n’importe guère. Mais le poète se trompe et cesse en effet d’être poète, dès qu’il veut donner la qualité de l’émotion pour la mesure de la connaissance.

L. A.

Luigi Barbera. — I simplicii contemporanei overo critica del calcolo infinitesimale. Bologne, G. Cenerelli, grand in-8o, 488 pages.

Simplicio est un personnage des Dialogues de Galilée : c’est lui à qui on montre, sur le cadavre, l’origine des nerfs et qui répond : « Vous m’avez fait voir la chose d’une façon si palpable, qu’on serait forcé d’avouer qu’elle est vraie, sans le témoignage contraire d’Aristote, qui dit expressément que les nerfs partent du cœur. »

Simplicio, paraît-il, a de nombreux descendants ; il y en a en Angleterre, en Allemagne, davantage en France, mais surtout en Italie. Il en est deux surtout auxquels en veut M. Barbera, parce qu’il a déjà eu maille à partir avec eux au sujet de travaux antérieurs ; il s’agit de deux mathématiciens hautement appréciés, aussi bien à l’étranger que dans leur pays, MM. Beltrami et Casorati ; mais, aux yeux de M. Barbera, ce ne sont que de vulgaires calculateurs, contre lesquels, sous le titre de Proemio, il écrit un véritable pamphlet de 200 pages, qui, je ne le cacherai pas, m’a fort amusé. Ce préambule se vend au reste tiré à