supérieurs sont ceux de la liberté (die Imperative der Freiheit). Les premiers ne peuvent guère produire que les signes et les symptômes extérieurs de la moralité ; les seconds ont leur origine dans la conscience même de l’agent. L’un de ces motifs consiste dans la satisfaction durable que laisse derrière elle l’action morale. Que ce soit là l’effet de la vertu, c’est ce que démontre tout ce qui précède. Ce qui est mauvais, c’est de prendre trop d’intérêt à ce qui passe ; or à ce qui passe ne peuvent être liés que des plaisirs passagers. La morale, au contraire, nous attache à ce qui est éternel et le plaisir qui en naît participe à la constance d’un tel objet. Enfin il est un dernier motif plus élevé que tous les autres, mais auquel les âmes d’élite sont seules accessibles : c’est celui qui provient de l’attrait qu’exerce la seule contemplation de l’idéal moral. Arrivée à cette pleine possession d’elle-même, la conscience morale repousse comme inutiles tous ces procédés factices, tous ces motifs auxiliaires qui servent aux âmes médiocres ou seulement moyennes. La cause est devenue, cette fois, de même nature que l’effet.
Voilà comment se sont formées les règles inspiratrices de la conduite. Celles que nous trouvons dans notre conscience et qui sont, comme nous l’avons dit, le fait primitif de la vie morale, sont spéciales et particulières. La tâche du moraliste est de coordonner cette multitude incohérente de prescriptions et de les ramener à quelques normes générales qui résument toute la morale. Il y a naturellement autant de ces normes fondamentales qu’il y a de fins morales, trois par conséquent. D’autre part, chacune d’elles présente un double aspect et prend une double forme selon qu’elle vise la portée objective de l’action ou l’état subjectif de l’agent. On obtient de cette manière le tableau suivant :
Forme subjective. — Pense et agis de manière à ne jamais perdre le respect de toi-même.
Forme objective. — Remplis les devoirs que tu t’es imposés soit vis-à-vis de toi, soit vis-à-vis des autres.
Forme subjective. — Respecte ton prochain comme toi-même.
Forme objective. — Sers la communauté à laquelle tu appartiens.
Forme subjective. — Considère-toi comme un instrument au service de l’idéal moral.