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Charmide (vers 393), — Protagoras. — Première moitié de la République. — Euthydème (391). — [Premier voyage en Sicile]. — Seconde moitié de la République (389). — [Fondation de l’Académie, 387]. — Banquet (385). — Phédon (384). — Théétète (vers 384). — Ménon (383). — Eutyphron. — Apologie ( ?). — Phèdre (379) — Gorgias (315) — Timée. — Philèbe ( ?). — [Aristote, disciple de Platon, 367] — Parménide. — Sophiste. — Politique. — Lois.

Antérieurement au Charmide, Platon peut au plus avoir écrit le Lysis ; ainsi il n’aurait en réalité commencé qu’assez tard, vers trente-six ans, sa carrière d’écrivain. Des études particulières l’ont-elles empêché de suivre plus tôt sa vocation, ou faut-il s’en prendre aux circonstances politiques ? Teichmüller à réuni un certain nombre d’indices tendant à prouver que Platon, avant d’écrire, s’était sérieusement occupé de médecine ; on sait que d’ailleurs, vers les premières années du ive siècle, après la mort de Socrate, il voyagea ; il y a quelques indices, d’après ses premiers dialogues, qu’il visita la Thrace, la Lydie, la Crète, peut-être la Phénicie, en tout cas l’Égypte. Le voyage à Cyrène est au contraire improbable ; quant à l’Italie, il n’y passa que lors de son premier voyage en Sicile (vers 390).

Revenu à Athènes vers 394, Platon ne retrouva de bonnes relations parmi les anciens amis de Socrate qu’avec ceux qui se montrèrent disposés à reconnaître sa supériorité, comme Euclide, Simmias, Cébès, Phédon. Socrate n’avait pas écrit, et le rêve de Platon était peut-être, la tourmente politique passée, de le remplacer comme chef d’une école à organiser, plus fortement pour agir par la parole privée, mais non par la plume, sur les destinées de sa patrie. Mais l’école socratique était déjà bien divisée sous des chefs divers comme Antisthène et Aristippe, qui avaient probablement déjà recouru à la publicité pour quelques écrits, et un banni d’Athènes, Xénophon, déjà célèbre par ses exploits militaires, venait d’attirer l’attention des penseurs par ses Mémoires sur Socrate. Platon se voyait donc obligé d’affirmer sa supériorité en publiant, lui aussi, des écrits philosophiques, et l’ouvrage de Xénophon était évidemment un des premiers qui lui imposaient de ne pas garder le silence.

Platon, d’autre part, devait être, avec la conscience qu’il avait de sa valeur, profondément blessé d’être à peine cité dans les Mémoires de Xénophon parmi les amis de Socrate ; tous ses sentiments devaient être froissés d’y voir son frère Glaucon présenté sous un jour ridicule, et de ses parents vaincus, mais en tout cas tombés honorablement les armes à la main : l’un, Critias, couvert d’injures, l’autre, son oncle Charmide, jugé comme un homme de mérite, mais d’un caractère timide.

Il fallait évidemment une grange hardiesse pour tenter une réhabilitation, même partielle, de Critias ; Platon ne recula pas devant cette tâche ; il ramène souvent dans ses dialogues l’impitoyable oligarque, et s’il n’entreprend point des justifications impossibles, il le présente en tout cas comme au dessus des accusations vulgaires. Quant à Charmide,