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PSYCHOLOGIE ET MÉTAPHYSIQUE


Le nom de psychologie est récent, mais les questions et les recherches dont ce nom réveille l’idée sont aussi anciennes que la philosophie, et ne pouvaient manquer d’y occuper de bonne heure une place considérable. La philosophie, en effet, a toujours voulu être la science de toutes choses : or la vie, le sentiment, la pensée sont des choses ou, si on l’aime mieux, des faits aussi réels que les mouvements des astres : et, si ces faits ne se produisent pas dans l’espace, à côté et en dehors des choses matérielles, ils constituent pour beaucoup d’entre elles une sorte d’existence intérieure, qui n’a pas moins d’intérêt aux yeux du philosophe que leur existence extérieure et visible. De plus, puisque la philosophie se propose d’expliquer toute la réalité, il faut bien qu’elle en cherche la dernière raison dans quelque chose qui ne soit plus réel et qui soit, par conséquent, une pure idée : or, nous trouvons en nous-mêmes certaines idées très générales qui nous semblent en effet dominer et expliquer toutes choses : il est vrai que nous pouvons douter si ces idées sont antérieures ou postérieures aux choses, si elles en sont le modèle ou la copie : mais, ce qui n’est pas douteux, c’est que, s’il y a une raison idéale des choses et si cette raison nous est accessible, c’est en nous-mêmes que nous devons la chercher. Depuis Platon jusqu’à Descartes, la partie la plus élevée de la psychologie n’a fait qu’un avec la métaphysique.

Il importe peu de savoir à qui la psychologie doit le nom qu’elle porte aujourd’hui mais c’est certainement à M. Cousin qu’elle doit le rôle prépondérant qu’elle joue, sous ce nom, dans la philosophie française. M. Cousin, au début de sa carrière, se proposa une double tâche : il voulut à la fois créer, ou du moins organiser définitivement l’étude expérimentale des faits de conscience, et faire de cette étude une sorte d’introduction aux autres parties de la philosophie et, en particulier, à la métaphysique. Il admettait, avec tout le xviiie siècle, que nous ne pouvons connaître immédiatement que des faits mais il croyait en même temps que l’étude des faits de