Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 19.djvu/469

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
465
ANALYSES.zeller. La philosophie des Grecs.

Mais par cela même que l’on ne saurait trop relire à ce point de vue l’ouvrage allemand et ses traductions, il importe de ne pas s’en rapporter à lui seul, de ne pas surtout laisser à l’écart un certain nombre de travaux français qui aujourd’hui encore sont loin d’être sans valeur. Zeller croit en effet qu’il est bon d’aborder l’histoire de la philosophie avec un système métaphysique et il introduit, pour nous borner à la partie qui vient d’être traduite, une philosophie des concepts et un idéalisme rappelant un peu trop l’hégélianisme, dans une époque où l’on ne s’était encore posé explicitement aucune des questions aux-quelles répondent de semblables solutions. De plus il n’estime pas toujours à leur juste valeur et quelquefois même il ne cite pas les ouvrages français qui ne présentent peut-être pas toujours des renseignements assez riches et assez sûrs, qui témoignent aussi parfois de préoccupations métaphysiques, mais qui presque toujours se plaçant à un point de vue qui n’est pas celui de Zeller, permettraient au lecteur de se faire par comparaison une idée plus exacte des doctrines qu’il est déjà difficile de reconstituer lorsqu’on se place à un point de vue strictement historique.

En ce qui concerne Socrate par exemple, Zeller cite bien les travaux de Fréret qu’il estime beaucoup, et de Lélut pour lequel il se montre peut-être un peu trop dédaigneux ; mais il ne mentionne ni la Vie de Socrate par Chaignet qui renferme bien des renseignements utiles, ni l’étude curieuse de M. Waddington dans son livre, Dieu et la conscience, ni le Socrate de Fouillée[1] dans lequel toutes les questions qui concernent la philosophie socratique ont été examinées longuement et avec une grande richesse d’informations ; ni enfin le rapport de M. Vacherot qui corrige sur certains points les conclusions un peu risquées de M. Fouillée. Enfin, depuis la dernière édition de l’ouvrage de Zeller, M. Boutroux a fait à l’Académie des sciences morales et politiques une lecture du plus haut intérêt sur la philosophie socratique.

Pour les demi-socratiques, Zeller cite l’histoire de l’école de Mégare et des écoles d’Elis et d’Érétrie par Mallet (1845) qui ne dépasse pas sensiblement, dit-il, le travail de Deycks (1827). On peut sans doute désirer une critique plus sévère que celle de Mallet, mais l’ouvrage réunit un certain nombre de textes bien choisis que tel auteur de thèse latine que nous pourrions citer, eût consultés avec fruit. Zeller trouve avec raison l’ouvrage de Henne sur l’école de Mégare (1843), plus personnel ; mais nous ne croyons pas qu’il mérite le reproche de diffusion que lui adresse Zeller.

Les Cyniques ont été l’objet en France d’un certain nombre de travaux dont pas un ne se trouve mentionné par Zeller : Il y aurait cependant profit à lire les thèses latines de Delaunay « : De cynismo et præcipue de Antisthene, Diogene et Cratete » ; de H. Joly : «  De cynica institutione sub imperatoribus romanis » (introduction) et surtout la thèse française

  1. La 3e édition de Zeller, sur laquelle paraît faite la traduction, est de 1875.