Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 19.djvu/439

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
435
revue générale. — histoire et philosophie religieuses.

quand un procès-verbal avait eu les vertus d’un exorcisme et avait été « fait pour délivrer » n’importe qui d’une possession diabolique. Je vois dans l’Introduction, signée B. de Moray, que c’est là le titre donné au manuscrit par l’un de ses anciens possesseurs. Ce titre aurait pu être modifié, ayant le double inconvénient d’estropier la langue et de donner une idée inexacte du contenu de l’ouvrage, lequel renferme toute une instruction, autrement dit une série de procès-verbaux de la prévôté de Louviers dans l’affaire de la possession d’une femme du nom de Françoise Fontaine, fait déjà connu par les historiens locaux. Ces procès-verbaux sont curieux par places et constituent un document bon à consulter pour l’histoire de la sorcellerie ou, plus exactement, de la névropathie hystérique ; malheureusement ils sont édités dans des conditions peu satisfaisantes. Je ne parle pas de la reproduction matérielle du texte qui, je le suppose, doit être tenue pour garantie par la signature d’un archiviste-paléographe, mais de l’Introduction diffuse et confuse qui précède celui-ci et qui ne répond nullement à ce qu’on attendrait d’un éditeur au courant des exigences de la science. M. B. de Moray nous raconte, d’un ton qui a la prétention d’être tour à tour grave et spirituel, toute espèce de choses qui aident médiocrement à l’intelligence du document qu’il présente au public. On nous y apprend qu’il n’y a ni démons ni possessions vraies ; on nous ressasse les histoires des hystériques de la Salpêtrière ; on nous fait savoir que la science ne recule pas devant les termes propres ; nous désirerions, à notre tour, que M. de Moray, si la bonne fortune lui amène de nouveau entre les mains des pièces analogues, comprît que la première chose à faire en ces matières, c’est d’annoter son texte de façon à expliquer les circonstances particulières à chaque récit. La lecture des procès-verbaux relatifs à Françoise Fontaine révèle immédiatement la catégorie du mal dont elle souffrait ; ce qui importe, c’est l’élucidation des détails, dont quelques-uns sont assez étranges. Naturellement, c’est de ceux-là que l’éditeur ne parle point, se bornant à des généralités, et farcissant son Introduction de citations et de renvois inutiles.

C’est le moment de signaler une publication de M. Eugène Monseur qui, sous le nom de Contribution à l’histoire des inquisiteurs des Pays-Bas au xive siècle[1], nous donne d’intéressants documents dont l’histoire ne manquera pas de faire son profit.

Au rebours des deux précédentes publications, c’est le côté lumineux du catholicisme aux temps de la Réforme, que M. Charles Dejob s’est appliqué à mettre en lumière dans son attrayante étude : De l’influence du concile de Trente sur la littérature et les Beaux-Arts chez les peuples catholiques, avec un sous-titre qui a pour objet d’indiquer le lien que l’auteur reconnaît entre l’action du Concile de Trente et le développement de notre propre histoire intellectuelle : Essai d’intro-

  1. In-8o, pages 78 à 112 du second fascicule des Travaux du cours pratique d’Histoire nationale de P. Frédéricq.