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III

L’étude des phénomènes psycho-sensoriels démontre qu’il existe une polarisation sensorielle, comparable de tous points à la polarisation motrice. Nous nous bornons à citer les faits les plus importants, pour abréger, car nous avons encore un long chemin à parcourir avant d’arriver aux dernières expériences, qui sont les plus intéressantes.

Polarisation d’une hallucination. — Il faut d’abord examiner le résultat que donne l’aimant en agissant sur une hallucination bilatérale.

VI. On suggère à Cail… en somnambulisme qu’il y a sur une table voisine un oiseau et une lanterne. Au réveil, elle voit l’oiseau et la lanterne allumée. On applique un aimant près de son poignet droit, sans qu’elle s’en aperçoive. Au bout de quelques instants, elle se frotte les yeux, dit qu’elle voit moins distinctement, que l’oiseau et la lanterne se rapetissent ; puis, elle ne voit plus l’oiseau du tout, et quant à la lanterne, elle n’en aperçoit plus que la lumière. Enfin, tout disparaît ; la table lui paraît complètement vide, bien que réellement il y ait dessus des pièces anatomiques diverses. Puis, elle se tait, il est impossible d’obtenir une seule réponse. Elle comprend ce qu’on lui dit et ce qu’elle voit écrit, peut ouvrir la bouche et tirer la langue, n’est pas de mauvaise humeur, rit facilement, mais elle ne peut pas parler et refuse absolument d’écrire. Cette malade n’a retrouvé l’usage de la parole que le lendemain matin à la suite d’une frayeur qui lui a fait pousser un cri.

On voit que l’aimant agit sur une hallucination bilatérale en la supprimant. Chez la malade précédente, la suppression est définitive l’hallucination ne reparaît plus. Il ne se passe point une série d’oscillations consécutives comme dans la polarisation des phénomènes moteurs. Cette absence d’oscillations est un fait propre à la malade, car nous avons observé que chez elle le transfert d’un trouble unilatéral était également privé d’oscillations. Voici d’ailleurs une seconde malade, chez laquelle la polarisation sensorielle est suivie d’oscillations régulières.

VII. On donne à Wit…, en somnambulisme, l’hallucination d’un oiseau posé sur sa main. À son réveil, on applique un aimant à gauche. La malade caresse l’oiseau avec la main gauche, en le tenant posé sur son index droit. Puis, elle le caresse avec la main droite, et