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A. BINET et CH. FÉRÉ. — la polarisation psychique

4o Une paralysie systématisée est remplacée par le mouvement correspondant. (Observation V.)

Dans toutes ces substitutions, un état est remplacé par l’état de signe contraire. La polarisation se définit ici par les faits, mieux que par toute formule.

La décharge convulsive qui termine la polarisation motrice offre un certain nombre de caractères qui peuvent la faire distinguer des convulsions hystéro-épileptiques propres à nos sujets, et qui la font ressembler aux attaques épileptiformes dues aux lésions limitées du cerveau et que M. Hughlings Jackson a désignées sous le nom de lésions à décharge. Ces convulsions sont ordinairement limitées au groupe de muscles qui a subi l’excitation ; mais comme les attaques d’épilepsie partielle, elles sont susceptibles de se généraliser ; c’est dans ce dernier cas seulement que l’on observe la perte de connaissance. L’accès débute par une trémulation rapide ; peu à peu l’amplitude des mouvements augmente et finit par constituer de grandes secousses saccadées. Lorsqu’au début de la convulsion on serre fortement et circulairement le membre qui en est le siège, on détermine un arrêt brusque du mouvement : cette même action suspensive de la constriction se retrouve fréquemment dans l’épilepsie partielle ; sitôt que la constriction a cessé, les mouvements reprennent. À la suite des excitations fortes, les convulsions de décharge se manifestent souvent successivement dans les quatre membres ; et chaque décharge est séparée de la suivante par un espace de temps variable, mais pendant lequel les membres non encore déchargés restent en contracture, et le sujet se rend parfaitement compte qu’il n’est pas complètement exonéré. L’accès est suivi d’un état d’affaissement qui dure très peu de temps lorsque l’attaque a été partielle ; mais lorsque la décharge a été générale et accompagnée de perte de connaissance, elle laisse après elle un état stertoreux qui rappelle tout à fait celui qui succède à l’attaque d’épilepsie vraie. Dans tous les cas, la décharge laisse à sa suite une sensation de bien-être des plus manifestes, la malade se sent légère, il lui semble qu’elle a grandi. Ajoutons enfin que ces manifestations convulsives ont pour effet inattendu de diminuer ou même de supprimer les attaques hystéro-épileptiques propres au sujet : il y a en somme une économie de convulsions, car les attaques hystériques ont une durée beaucoup plus considérable et se répétaient bien plus souvent que les décharges expérimentales que nous venons de décrire.