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G. POUCHET. — la biologie aristotélique

animaux ressemblent aux plantes : les racines, qui absorbent la nourriture, sont des bouches et représentent en conséquence la tête du végétal (Des parties, IV, 10), tandis qu’il se reproduit par l’extrémité opposée, par son sommet aérien, de même que l’homme et les animaux se reproduisent par la partie inférieure de leur corps opposée à la bouche (Jeunesse, I, 15 ; Longévité, II, 17). Ce parallèle entre les Testacés turbinés et les plantes est souvent repris dans la collection aristotélique. Les plantes sont à la terre ce que les Coquilles sont à la mer. On trouve aussi peu de Coquilles terrestres, qu’il existe peu de plantes marines, et elles sont presqu’aussi rares dans les eaux douces. Elles sont humides — ceci doit être entendu du corps, non du test de l’animal — et tiennent de la nature de l’eau ; les végétaux, au contraire, sont secs et tiennent de la nature de la terre (Gen. III, 10, et suiv).

Parmi les Testacés à deux valves Aristote signale le Solen qui se distingue des autres, en ce qu’il ne peut ouvrir sa coquille, où son corps est enfermé comme dans une sorte d’étui. Ce détail est exact (Des parties, IV, 17).

Les Oursins étaient alors, de même qu’aujourd’hui un mets recherché ou plutôt un objet de grande consommation. Notre philosophe décrit très bien l’appareil compliqué qui arme leur bouche et qui a d’ailleurs conservé en histoire naturelle le nom de « Lanterne d’Aristote » (Des parties, IV, 5). Il décrit avec non moins d’exactitude les autres organes internes[1], mais il croit que ces animaux marchent en s’aidant seulement de leurs piquants, erreur bien excusable dans un temps où, comme nous l’avons dit, on n’avait pas d’aquariums qui permissent d’observer à l’aise les pieds ambulacraines transparents et filiformes de ces singuliers êtres. — Les Étoiles de mer étaient déjà connues pour les ravages qu’elles causent dans les huîtrières.

Les Thétyes, nos Ascidies, nos Salpes, nos Biphores, tous nos Tuniciers, sont pour Aristote des animaux assez peu différents des plantes (Des parties, IV, 5). — Les Éponges s’en rapprochent encore davantage, ne vivant qu’attachées au sol comme les végétaux, et mourant dès qu’on les arrache. — Enfin sous la désignation d’Acalèphes ou orties de mer, Aristote rapproche, comme le font nos plus récentes classifications, les Méduses et les Actinies. Les Acalèphes représentent, de même que les groupes précédents, une catégorie d’êtres dont la place ambiguë est entre les animaux et les plantes

  1. Hist. animaux, IV, v). Il est également question des Oursins au traité Des parties (IV, v), où quelque confusion semble avoir été faite entre les ovaires et le tube digestif, qui sont au contraire décrits en toute exactitude dans l’Histoire des animaux.