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comme le prouve l’exemple de l’éléphant (Gen., IV, 71) qui est un animal digité[1], et qui n’a qu’un petit en raison de sa taille. Cette loi de relation entre le volume de l’espèce et le nombre des petits s’applique également aux volatiles et aux animaux qui nagent (Gen., IV, 71). De même ce sont aussi les plus petites plantes qui ont le plus de graines, la nature combattant toujours les risques de destruction, par le nombre.

Une autre question de zoologie générale traitée avec de grands développements est celle de la durée de la vie chez les êtres vivants. Au reste la collection aristotélique comprend un traité spécial De la longévité et de la brièveté de la vie. Les plus gros animaux ne sont pas ceux qui vivent le plus longtemps ; le cheval, par exemple, vit moins que l’homme. Ce ne sont pas davantage les plus petits, car la plupart des insectes sont annuels. Tout ce qu’on peut dire, c’est qu’en général les gros animaux vivent plus. Les animaux qui ont du sang (= Vertébrés), sous ce rapport, n’ont pas non plus toujours l’avantage sur les autres, car l’abeille vit plus longtemps que certain d’entre eux. Les Mollusques (= Céphalopodes) et les Testacés ne vivent que peu. Les plantes ne sont pas plus indestructibles que les animaux, il y en a dont l’existence est courte et beaucoup sont annuelles ; toutefois, d’une manière générale, c’est parmi les végétaux que se trouvent les êtres qui vivent le plus longtemps, et entre tous il faut citer les palmiers (Long., IV).

La vieillesse comme on l’a vu, étant, une sorte de dessèchement, de perte de l’humidité chaude qui fait la vie, on conçoit que, d’une manière générale, les gros animaux, en raison de leur volume, se dessèchent moins vite que les petits et arrivent plus lentement au terme de l’existence. Enfin la lascivité, par la dépense de fluide séminal, abrège la vie. C’est pour cela aussi que les mâles des passereaux vivent moins longtemps que les femelles (Long., V, 6). Toujours grâce à cette influence de la chaleur, les animaux aussi bien que les hommes vivent plus longtemps dans les climats chauds que dans les froids. Et dans les climats chauds ce sont surtout les animaux froids par nature qui prennent des dimensions considérables : on y voit les serpents, les lézards, les bêtes à écailles devenir énormes ; de mêmes les coquillages dans la mer Rouge (Long., V, 9).

Voici donc les influences du milieu[1] nettement indiquées comme déterminant les formes animales. C’est le germe d’une science qui se constituera seulement de nos jours. Mais Aristote se trompe en

  1. a et b Voy. ci-dessus, p. 533, d’autres exemples : les Sarmates et leurs moutons, les petits oursins des profondeurs froides de la mer.