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G. POUCHET. — la biologie aristotélique

devance et dépasse Buffon[1]. On a cité beaucoup de ces aphorismes biologiques, en voici quelques-uns moins souvent rappelés :

« Les mouvements de latéralité de la mâchoire inférieure n’existent que chez les animaux qui broyent leur nourriture. — Les oiseaux à long cou ont de longues pattes, excepté les oiseaux nageurs (Des parties, IV. 12) ; aucun oiseau ayant le cou long n’a de serres ou d’ergots. Dans les espèces où le mâle n’a pas de verge, la femelle ne présente pas d’orifice génital spécial (Gen., I, 25). — Tous les animaux véritablement vivipares respirent l’air.

« Aucun animal n’a la queue empennée, qui n’ait de grandes plumes aux ailes (Des parties, IV, 13) : loi donnée à propos des chauves-souris, mais qui s’applique à tous les oiseaux sans ailes de l’hémisphère austral et même à l’Archéopteryx des terrains secondaire, muni à la fois de rémiges et de longues pennes à la queue. — D’une manière générale les animaux qui ont du sang (= Vertébrés), sont plus gros que ceux qui n’en ont pas (= Invertébrés) ; les animaux qui se déplacent, plus volumineux que les animaux fixés (Gen., II, 3. Resp., XIII, 3)[2]. Parmi les animaux qui ont du sang. aucun de ceux qui s’accouplent ne produit un grand nombre de petits ; ceux qui ne s’accouplent pas (= poissons téléostéens) ont des œufs en quantités innombrables (Gen., III, 59). »

Ces questions de taille et de nombre des petits sont abordées dans le traité De la Genèse. Nous en avons déjà parlé. « Les plus gros animaux ne mettent au monde qu’un petit, comme l’éléphant, le chameau, le cheval et les autres quadrupèdes à sabots. Les Digités, qui ont généralement la taille moins grande que les animaux précédents, sont presque tous pluripares, ainsi que les tout petits animaux comme le genre des rats (Gen., IV, 68-69) » [3]. Le nombre des petits étant en rapport avec la taille, se trouve par suite en rapport avec la disposition des extrémités des membres, puisque les Digités sont généralement moins gros que les Solipèdes et les Fissipèdes[4]. Ce rapport toutefois n’est pas absolument rigoureux,

  1. À Buffon appartient le mérite d’avoir formulé cette loi que les espèces animales d’un même groupe ont généralement une taille en rapport avec les dimensions du continent qu’elles habitent le Chameau et la Vigogne, l’Autruche et le Nandou, l’Éléphant des Indes ou d’Afrique et l’espèce de Bornéo, le Lion et le Cougouar, la petite taille de tous les animaux d’Australie dont le géant est le Kanguroo, enfin l’océan habité par les plus gros des animaux, les Baleines et les Cachalots.
  2. La cause en est que chez les grands animaux la nourriture tourne toute entière au profit de la taille, et que chez les petits la nature limite de ce côté l’aliment, et l’utilise au contraire pour la production (Gen., IV, 69).
  3. Voy. t.  XVIII, p. 527.
  4. Voy. ci-dessus, p. 203, le cas particulier de la truie.