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P. REGNAUD. — l’idée de temps

blir qu’en montrant l’enchaînement identique du sens des mots correspondant à l’idée en question ; c’est-à-dire à l’aide de déductions reposant le plus souvent sur la phonétique et l’étymologie. On voudra donc bien nous permettre, dans les discussions qui vont suivre, d’aborder les détails techniques nécessaires à la démonstration que nous avons à fournir.

Examen du sens primitif des principaux mots qui, dans les langues indo-européennes, désignent les divisions du temps ou le temps lui-mème.

Sk. ahan ou ahas, jour.

Ce mot signifiait primitivement la partie brillante des vingt-quatre heures qui composent le jour astronomique ; du moins il est permis de l’induire de sa parenté certaine avec sk. ahana, brillant, et très probable avec sk. agni, feu, gr. ἄχνη, efflorescence (chose brillante), ἁγνός pur, primitivement blanc, brillant, etc.

Gr. ἧμαρ, ἡμέρα, jour.

Même sens primitif que le précédent. Un savant linguiste italien, M. Ascoli, a déjà émis l’opinion que ces mots contiennent la racine que nous trouvons en sanskrit sous la double forme vas, us, et qui signifie briller, brûler, etc. Mais on peut préciser davantage encore et comparer directement ἧμαρ au sk. usman ou ûsman, chaleur, saison chaude, etc. Effectivement, en ce qui concerne l’initiale, le rapport est le même entre ces mots que celui du sk. usas, aurore avec le gr. ἦως, même sens ; or, de l’aveu de tous les étymologistes, ces deux derniers vocables dépendent également de la rac. vas, us. Le σ de ἧμαρ, pour *ἧσμαρ, est tombé devant le μ comme dans le pronom ἦμᾶς, pour *ἠσμας, auprès du sk. asmân ; dans εἶμι, je suis, pour *εἰσμι, auprès du sk. asmi ; dans εἴμα vêtement, pour *εισμα, auprès de la rac. sk. vas, vêtir, etc. Enfin, la désinence αρ de ἧμαρ est à la désinence an de usman, dans un rapport identique à celui qui existe entre les mêmes désinences dans le gr. οὗθαρ, mamelle, et le sk. udhan, même sens.

L’identification phonétique des deux mots et les conséquences étymologiques qui en découlent ne laissent donc prise à aucune objection.

Lat. dies, jour.

Même sens primitif que les précèdents, ainsi que cela ressort de la parenté bien constatée de ce mot avec le sk. dyaus, ciel, lumière, jour et avec deus, divus (cf. particulièrement le dérivé diurnus et