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A. BINET et CH. FÉRÉ. — hypnotisme et responsabilité

système nerveux qui leur permet quelquefois de ne pas résister à certaines suggestions, même à l’état de veille : il est donc nécessaire de les considérer en dehors du sommeil hypnotique. D’autre part, le sujet endormi doit être examiné séparément dans deux conditions : soit abandonné à lui-même, en dehors de toute action étrangère, à l’état de repos, soit à l’état d’activité, sous l’influence des suggestions ou simplement des excitations.

I. Considérons d’abord l’hypnotisme, nous étudierons ensuite les hypnotisables.

Mais avant tout, qu’est-ce donc que l’hypnotisme ? On comprend sous ce nom plusieurs états nerveux différents qui peuvent être ramenés, d’après la description de M. Charcot[1] en parfait accord avec celles de MM. Tamburini et Seppili[2], à trois types fondamentaux : 1o état cataleptique ; 2o état léthargique ; 3o état de somnambulisme provoqué. Nous allons rappeler encore une fois les caractères principaux de ces trois états.

A. État cataleptique. — Il peut se produire : 1o primitivement sous l’influence d’un bruit intense et inattendu, d’une lumière vive qui frappe le regard, par la fixation prolongée d’un objet quelconque, etc. ; — 2o consécutivement à l’état léthargique lorsque l’on ouvre les yeux du sujet dans un lieu éclairé. Le sujet cataleptique est immobile, comme pétrifié. Il regarde fixement, les yeux ouverts. Les différentes parties du corps sont susceptibles de conserver les attitudes qu’on leur communique pendant un temps très long sans qu’il se manifeste aucun des phénomènes qui accompagnent ordinairement l’effort. Les réflexes tendineux sont abolis, l’hyperexcitabilité neuro-musculaire n’existe pas. Il y a insensibilité complète à la douleur ; mais les sens spéciaux et le sens musculaire conservent une partie de leur activité. C’est ce qui permet d’impressionner le sujet par voie de suggestion et de provoquer des hallucinations, des impulsions automatiques. Sous l’influence de la suggestion, les attitudes fixes, artificiellement imprimées aux membres, font place à des mouvements coordonnés en rapport avec l’hallucination ; quand la suggestion a cessé, le sujet redevient immobile.

B. État léthargique. — Il est déterminé : 1o primitivement par la fixation d’un objet quelconque, ou par l’occlusion avec compression légère des yeux, etc. ; 2o consécutivement à l’état cataleptique, par l’occlusion des paupières ou par le passage dans un lieu obscur. On

  1. Charcot. — Essai d’une distinction nosographique des divers états compris sous de nom d’hypnotisme. (C. R. Ac. des sciences, 1882.)
  2. Tamburini et Seppili. — Contribution à l’étude expérimentale de l’hypnotime. (Archivio di Frenatria, an VII, fasc. III ; an VIII, fase. IV et V).