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Dr SIKORSKI . — l’évolution psychique de l’enfant

année de leur vie que durant la deuxième et la troisième, c’est aussi un phénomène normal. Cette particularité a été bien observée par M. Preyer et dépend, comme nous l’avons dit plus haut, d’un plus grand développement des affections de l’enfant[1] à cette époque, que dans un plus bas âge. En observant les enfants pleurnicheurs, nous trouvons chez eux d’autres rapports émotionnels : ici le cri est souvent un phénomène plus prononcé que les larmes, de sorte que leurs pleurs produisent un effet désagréable à l’observateur. On remarque au surplus, chez des enfants pleurnicheurs, des sanglots si fortement accentués qu’on pourrait les qualifier de mouvements spasmodiques. Les sanglots sont, comme on sait, des inspirations subites tantôt accompagnant les larmes, tantôt apparaissant comme phénomène indépendant. On peut les envisager comme des pleurs transformés et réduits. Chez les enfants peu pleurnicheurs les sanglots, sont en général, de courte durée, et cessent bientôt après qu’il ont cessé de pleurer, sauf dans les cas, où ils ont été effrayés ou ont subi une forte émotion psychique. Chez des enfants pleurnicheurs les sanglots sont, par contre, très opiniâtres : l’enfant ne peut les maîtriser malgré tous ses efforts ; ils sont quelquefois très prolongés et persistent souvent pendant quelques minutes, jusqu’à une demi-heure et plus, comme spasmes isolés pour la plupart très très forts, alors même que l’enfant a cessé de pleurer, et paraît s’être complètement tranquillisé et s’être endormi.

En observant la mimique des pleurs et d’autres phénomènes analogues, on trouve plusieurs particularités. Indépendamment de ces expressions mimiques qui correspondent à l’action de pleurer modérément ou à chaudes larmes des adultes, on remarque souvent chez les enfants[2] les particularités suivantes : tantôt leurs pleurs sont accompagnés de cris violents, de mouvement des extrémités, et présentent le caractère d’une irritation et d’une inquiétude générale ; tantôt, au moment de l’accès de pleurs, survient la contraction du muscle pyramidal du nez, et alors l’expression du visage offre le caractère évident de la méchanceté et du courroux ; tantôt, enfin, les pleurs se prolongent outre mesure, et se rapprochent, par leur durée infinie par le dessèchement des larmes, de cet état affectif qui rentre dans le domaine des phénomènes maladifs, des crampes coordonnées. Dans ces cas, les accès de larmoiement portent déjà le caractère évident de transition aux formes plus compliquées : c’est

  1. Ibid., p. 192.
  2. Ceci se rapporte aux enfants âgés de plus d’une année ; les enfants en plus bas âge ne présentent encore par leur mimique aucun caractère tranché, de même que les affections ne sont pas encore formées chez eux.