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ANALYSES.e. mach. Transformation des idées.

rasser le mieux possible de l’influence funeste du fondateur de la néoscolastique.

Anthropos.

E. Mach. Ueber umbildung und anpassung im naturwissens-chaftlichen denken (De la transformation et de l’assimilation des idées dans les sciences naturelles). Vienne, Hartleben, 1884.

La petite brochure dont nous nous proposons d’entretenir le lecteur contient le discours qu’a prononcé le 18 octobre 1883 M. le professeur de physique, Dr E. Mach, lorsqu’en sa qualité de recteur nouvellement élu, il a inauguré l’année dernière les cours de l’université allemande de Prague. Son discours se rapproche à plusieurs égards des idées qu’ont développées dernièrement deux penseurs : M. Stricker (dans la première partie de sa « Physiologie du droit » ), ce discours étant pour ainsi dire une démonstration particulière et pratique des idées que ce dernier savant devait publier huit mois plus tard[1], et M. le baron Du Prel (dans le premier chapitre de sa « Philosophie de la mystique[2] » : Du développement des sciences). Les remarquables idées de M. Mach portent l’empreinte de l’esprit clair et objectif du vrai observateur de la nature, qui n’a pas de préjugés, de parti pris, sur lesquels il puisse se baser pour chercher à expliquer les nouvelles observations et à les enregistrer dans les anciens cadres de la science.

Darwin, dit M. Mach, qui avait l’esprit ouvert et non prévenu de Galilée, a découvert cette qualité de la nature organique que nous nommons sa plasticitė. Si nous nous imaginons l’organisme comme étant une masse plastique, qui garde la forme qui lui a été donnée par des causes antérieures, jusqu’à ce qu’elle en subisse de nouvelles, cette faculté explique l’hérédité et l’accommodation. Il n’y a pas trente ans que Darwin a exposé les traits fondamentaux de sa théorie de l’évolution, et nous voyons aujourd’hui ses idées prendre racine dans tous les domaines, en histoire, en philologie, en physique. On parle du struggle for life entre les corps célestes[3] et entre les molécules[4], Hering parle « De la mémoire » comme d’une fonction générale de la matière organique » et Dubois-Reymond traite dans le sens darwinien « De l’exercice » )[5]. M. Mach étudie les assimilations intellectuelles que tous ceux qui veulent apprendre peuvent observer sur eux-mêmes.

Le sauvage est impuissant et interdit en présence des phénomènes

  1. Voir la Revue philosophique du mois de novembre 1884, p. 570 s.
  2. Philosophie der Mystik, Leipzig, Günther, 1886.
  3. V. l’ouvrage de M. Du Prel : Entwicklungsgeschichte des Weltalls, 3e édition, 1882.
  4. Pfaundler, dans les Annales de Poggendorf, Jubelband, p. 182.
  5. Almanach de l’Académie des Sciences de Vienne, 1870.