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problèmes métaphysiques qu’elle enveloppe et dont il n’est parlé que dans l’appendice. Ces rapports se réduisent à la corrélation de deux ordres de phénomènes constamment liés entre eux.

Les états de l’esprit sont divisés en trois classes, le sentiment qui contient tous les états agréables et pénibles, la connaissance et la volonté ou l’action. L’attention, et c’est là une des nouveautés de l’ouvrage, est considérée comme « une condition générale des opérations mentales ». — « La connaissance, le sentiment et la volonté, dans la mesure même où ils sont des phases vives et distinctes de la vie mentale, enveloppent l’attention. »

Aussi l’étude générale des phénomènes de l’esprit commence-t-elle par une théorie de l’attention. À notre connaissance, aucun psychologue anglais n’avait non seulement assigné une telle place à cette théorie, mais même jugé nécessaire d’y consacrer un chapitre spécial. M. Bain lui-même qui, d’après Stuart Mill, a tant fait pour réintégrer en psychologie la notion de l’activité de l’esprit, ne parle guère de l’attention qu’en passant et à propos d’autres phénomènes.

M. Sully la définit la direction active que l’esprit se donne à lui-même (the active self-direction of the mind) vers tout objet qui se présente à lui sur le moment. Elle est à peu près identique à la conscience que l’esprit a de ce qui lui est présent, et cependant il faut distinguer l’état de conscience diffuse où l’esprit ne fait aucun effort pour se fixer sur un objet particulier, de l’attention qui est une conscience plus étroite et plus intense. — Avec cette abondance de vues qui lui est propre, M. Sully épuise, en quelque sorte, l’étude de l’attention ; il traite de ses objets, de ses effets, de ses concomitants nerveux, de son étendue, de sa force, de ses stimulus extérieurs et intérieurs, de ses espèces, etc. Il distingue l’attention involontaire ou réflexe et l’attention volontaire ; et il s’efforce de déterminer les lois de chacune d’elles.

Le chapitre de la sensation ouvre l’étude de l’intelligence. Pourtant M. Sully ne la considère pas comme un phénomène intellectuel. « Les sensations, dit-il, même distinguées et classées, ne sont pas la connaissance, elles n’en sont que les matériaux. » D’où il faudrait peut-être conclure l’insuffisance de la division ternaire et la remplacer par une division quaternaire comme celle que proposait le professeur Sharpey : Sensations, intelligence, sentiments et volonté.

Les sensations sont rapportées par notre auteur à deux sortes de sensibilités : la sensibilité générale ou commune et la sensibilité spéciale qui comprend les cinq sens. Cependant le sens musculaire est distingué du toucher sans qu’on voie bien clairement s’il rentre dans la sensibilité générale ou s’il est lui-même un sens spécial. Les lois générales des sensations et leurs différentes espèces sont étudiées d’après les travaux les plus récents des psychologues et des physiologistes de l’Angleterre et de l’Allemagne.

Le chapitre de la perception est un de ceux où l’auteur déploie au plus haut degré sa faculté d’analyse patiente et « exhaustive ». Il