Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 19.djvu/213

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
209
ANALYSES.j. sully. Outlines o f psychology.

Les quatorze chapitres de l’ouvrage peuvent visiblement se ramener à quatre chefs principaux : 1o la psychologie et l’esprit en général ; 2o l’intelligence ; 3o les sentiments ; 4o la volonté.

Quelle idée M. Sully se fait-il de la psychologie ? — La préface nous renseigne sur ce point. « Je pars, dit-il, de la vieille conception de la psychologie comme nettement distincte des sciences physiques ou naturelles en tant qu’elle est la première des sciences morales, ayant affaire aux phénomènes du monde intérieur, et employant une méthode ou un instrument qui lui est propre, à savoir l’introspection. J’admets en outre que, comme science de l’esprit, elle soutient une relation toute particulière avec des problèmes philosophiques ou métaphysiques, tels que la nature et les limites de la connaissance, et la nature de la responsabilité morale. En même temps je tiens que la psychologie, science de l’esprit, est vraiment une science de l’esprit. Je veux dire par là d’abord qu’elle traite de faits ou de processus qui, comme ceux du monde extérieur, manifestent un ordre ou une uniformité de succession et peuvent par conséquent être rangés sous des lois définies, ensuite qu’elle trouve dans ses instruments et ses méthodes de recherches convenablement employés des moyens suffisants d’établir ces lois. Cette conception de la psychologie est opposée, d’une part, à la doctrine qui nie, au moins en partie, que la région intérieure de l’esprit soit un règne d’événements naturels soumis à un ordre fixe ; et d’un autre côté, elle ne contredit pas moins ouvertement la doctrine de Comte et de ses disciples : que l’introspection est incapable d’être employée comme instrument scientifique et que, par conséquent, les faits de l’esprit ne peuvent être étudiés que comme un groupe spécial de faits biologiques. Tandis que je suis ainsi la tradition en réclamant pour la psychologie une place en dehors des sciences physiques, à titre de science morale fondamentale, je suis les modernes dans leur tendance à compléter l’étude proprement psychologique de l’esprit par l’étude physiologique des antécédents et concomitants nerveux. Bien que de telles recherches ne puissent pas remplacer l’observation directe des phénomènes de l’esprit, elles me semblent apporter à la science de l’esprit, un complément précieux, surtout dans ses parties les plus simples (théorie de la sensation, etc.). »

Dans le premier chapitre, les deux méthodes subjective et objective sont comparées, et l’auteur conclut à la nécessité de leur association. M. Sully, sans rejeter la psycho-physique, la subordonne donc à la psychologie proprement dite, telle que les travaux des Écossais et des Anglais l’ont constituée. Il ne fait pas non plus une bien large part à la psychologie évolutionnelle dont il fait une partie de la psychologie, au lieu d’y voir, comme M. Spencer, la méthode générale de la psychologie tout entière.

L’esprit est défini par contraste avec la matière « ce qui n’a pas d’existence dans l’espace ». La question des rapports de l’esprit et du corps est traitée dès le début en quelques paragraphes sans égard aux