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G. POUCHET. — la biologie aristotélique

partie du IIIe livre du traité De la Genèse qui s’occupe de la constitution et du développement de l’œuf de la poule, est loin cependant d’être aussi remarquable qu’une foule d’autres passages également relatifs à l’embryogénie des animaux (Gen., III, 41, et passim).

Dans l’œuf, le blanc et le jaune sont séparés par une membrane (Gen., III). Il existe en effet une « membrane vitelline » autour du jaune, qui ne garde sa forme sphérique que tant qu’elle est intacte. Mais ce passage fait probablement allusion aux chalazes, formées de la couche d’albumen plus dense appliquée contre le vitellus, et tordues en deux sortes de cordons flottants du côté du gros et du petit bout.

« Le jaune est de nature terreuse, car il change à peine de volume en se desséchant à l’air, tandis que le blanc se réduit beaucoup en laissant échapper l’aqueux qu’il contenait (Gen., III, 21-25). Le jaune durcit par l’action du froid ; il devient au contraire liquide quand il est échauffé soit par l’oiseau qui couve, soit par la terre, pour les animaux qui y déposent leurs œufs (Gen., III, 39)[1]. À l’inverse le blanc se liquéfie par l’action du froid, et au feu devient dur. C’est la raison pour laquelle il se condense à mesure que grandit le poussin (Gen., III, 40). » Cela signifie probablement que les organes du nouvel être résultent d’une sorte de coction du blanc, car c’est du blanc qu’Aristote fera provenir celui-ci (voy. plus loin). En réalité l’albumen du poulet se liquéfie davantage au cours de l’incubation.

Ce qui a trait à la formation des œufs est assez peu explicite. « Les tout jeunes œufs qu’on aperçoit en développement dans la matrice (= ovaire) de la poule, sont simplement le fluide séminal femelle sécrété à cette place sous la forme d’une masse blanche[2]. Celle-ci attirant le sang à elle devient jaune. Elle se nourrit aux dépens des parois de la matrice, comme l’embryon des vivipares y puise son aliment au moyen du cordon (Gen., III, 17). Puis quand la chaleur commence à l’abandonner ( ?), ce vitellus produit autour de lui sa couche d’albumen (Gen., III, 25). « Il est dit également que l’œuf reste mou aussi longtemps qu’il grossit (Gen., III, 17), et qu’il est pondu dans l’état de mollesse, mais que sa coque se durcit aussitôt (Gen., III, 30) en perdant de son humidité. L’auteur semble croire que, jusqu’au moment d’être pondu, l’œuf reste attaché au corps de la poule

  1. On lit plus loin : « Le jaune exposé au chaud (à une chaleur douce évidemment, comme celle de l’incubation) ne se solidifie pas parce qu’il est de la même nature terreuse que la cire. » Ce rapprochement était dû sans doute aussi en partie à la couleur du vitellus.
  2. C’est en effet la couleur des vésicules de Graaf à l’origine.