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correspondance

proportion des succès diminue d’une façon sensible, on pourrait en conclure à l’influence plus ou moins grande d’une transmission inconsciente par l’intermédiaire de l’appareil auditif.

Agréez, etc.

Paris 15. décembre 1884,
Paul Tannery.


L’observation de M. Léchalas relative à la probabilité totale serait très exacte, s’il s’agissait de calculer des différences très petites ; il est certain que le nombre probable n’est que probable, et que sa probabilité peut elle-même être calculée ; mais je n’ai pas tenu compte de cet élément nouveau de calcul, de peur d’introduire, au milieu de tant de chiffres, une complication nouvelle.

Pour prendre un exemple simple, je suppose qu’on joue 500 fois à pile ou face ; le nombre probable des succès est 250 ; mais ce nombre, qui est le nombre probable, est assez improbable en lui-même ; très rarement on tombera sur le nombre juste des succès, nombre qui est cependant le plus vraisemblable de tous les nombres qui peuvent être obtenus de 0 à 500.

De même, si, comme le suppose M. Léchalas, on trouve cent fois de suite le nombre probable, cela rendrait la suggestion ou toute autre cause modifiant les effets du hasard presque absolument certaine. Jouez à pile ou face cent parties de deux tirages ; quoique le nombre probable soit de 1 succès sur une partie de 2 tirages, si vous trouvez cent fois de suite, un succès sur deux tirages, vous pourrez en conclure, avec une certitude morale presque absolue, qu’une cause quelconque intervient pour donner à cet événement, si probable qu’il soit, une régularité aussi parfaite. En un mot, un événement, même probable, comme est le nombre probable, devient, par sa répétition même, d’une extrême improbabilité ; et la probabilité, d’abord très forte, devient peu à peu de plus en plus petite.

Il s’agit, donc de savoir, dans ces expériences de suggestion, si le nombre obtenu réellement a une probabilité totale plus forte ou plus faible que le nombre probable. Pour être complet, j’aurais dû établir un rapport entre la probabilité du nombre probable, et la probabilité du nombre réellement obtenu. Je ne l’ai pas fait pour ne pas compliquer les résultats, et parce que cela n’a aucune importance dès que la probabilité du nombre probable est forte, et dès que la probabilité du nombre réel est très faible, comme dans plusieurs de mes expériences.

La probabilité du nombre probable, S étant le nombre d’épreuves, les deux probabilités contraires, est exprimée par la formule :