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ANALYSES.muhry. Kritik und kurze Darlegung, etc.

épilégomènes qui ferment le volume. Je n’ai rien à reprendre à l’ordonnance de l’œuvre, je ne m’y conformerai pourtant pas en cette analyse, et je demande à l’auteur la permission de rassembler ses arguments en quatre groupes, selon qu’ils ont rapport : 1o à la finalité comme loi ;  2o à l’existence et à la finalité spéciale de l’esprit ; 3o aux problèmes ultimes ; 4o aux conséquences d’un dyoïsme finaliste dans la théorie et dans la pratique.

1o Finalité comme loi. — M. Janet, on s’en souvient, s’efforce d’abord d’établir la finalité « comme loi ». Il expose que, dans une série combinée de phénomènes, tout résultat doit être en même temps considéré comme un but, puisque ce résultat est un effet futur qui, entre une infinité de combinaisons possibles, semble avoir circonscrit l’acte des causes efficientes et l’avoir déterminé à telle forme donnée ; et si, pour être comprise, une combinaison de phénomènes doit être rapportée non seulement à ses causes antérieures, mais à ses effets futurs, le rapport de cause à effet se transforme en un rapport de moyen à but. Toutefois le principe de causation est insuffisant à établir le principe de finalité, et c’est l’esprit qui porte ce dernier dans l’ordre des phénomènes, en vertu d’une analogie qui existerait entre les opérations de la volonté et celles de la nature.

M. Mühry raisonne, au fond, de la même manière, et il se flatte de construire, par la logique, une métaphysique qui vaille mieux qu’une poésie spéculative. Ce n’est pas le finalisme vulgaire qu’il entend. Il se défend de poser des buts de fantaisie, ou même de recourir à aucune utilité de la nature pour l’homme. Dire que la terre et le soleil sont disposés à notre usage n’est pour lui que fausse téléologie. Mais « la proportionnalité quantitative ou qualitative des parties d’un tout nous fournit la preuve que, dans l’objet étudié, les lois logiques sont immanentes et agissantes, Ce qui est proportionné a été pensé (§ 3) ». Et voici les deux principaux exemples qu’il nous donne, exemples choisis dans la nature inorganique, parce qu’ici, dit-il, on ne peut invoquer l’accommodation, comme on a coutume de faire dans le monde organique, où pourtant, à son avis, elle est encore, en dépit des darwinistes, pure téléologie (§ 3 et 5).

Son premier exemple est l’égalité admirée par Bessel, des deux mouvements de rotation et de révolution de la lune, en vertu de laquelle ce satellite nous présente toujours sa plus belle moitié. On pensera aussitôt au frottement, dû à l’action des marées, de l’enveloppe liquide sur l’écorce solide de notre globe, qui tend à affaiblir, en la réfrénant, l’énergie rotative de la terre, jusqu’à l’amener aussi à offrir à la lune constamment une même face. L’auteur, qui n’ignore rien, a prévu l’objection (note 2) et refuse ce cas, à l’encontre des calculs des professeurs Thomson et Tait, Balfour Stewart et autres encore. Son second exemple est la circulation favorable des courants des océans et de l’atmosphère, le beau rapport qui existe entre la profondeur du lit des mers et la hauteur des continents, etc., et le § 5 du livre est à coup sûr un mor-