Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 17.djvu/657

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
653
ANALYSES.richet. L’homme et l’intelligence.

entièrement inédite, renferme un grand nombre de notes et d’observations psycho-physiologiques se rapportant aux questions traitées dans le corps du livre ; toutes ces notes sont fort intéressantes et presque toujours très suggestives et constituent des documents psychologiques d’autant plus précieux que ces matériaux ne sont pas à l’état brut, mais qu’il y a la plupart du temps à côté des faits un essai d’explication ou une hypothèse qui éclaire la voie. — Mais, malgré la variété des questions, l’ouvrage présente une réelle unité qu’il n’est pas difficile de montrer et qui tient à ce que l’on retrouve partout deux ou trois idées maîtresses. J’ajoute quela méthode, solide, est toujours la même, de quelque sujet qu’il s’agisse : c’est cette méthode expérimentale qui s’appuie sur des phénomènes scientifiquement observés, tâche de ne s’en écarter jamais et établit la psychologie sur ce ferme terrain.

Une analyse détaillée n’est pas nécessaire pour prouver ces assertions, puisque les lecteurs de la Revue connaissent évidemment une bonne partie des travaux de M. Richet. Il suffira sans doute de fixer les grandes lignes des principales questions. L’étude sur le somnambulisme se prêtera très aisément à un examen de ce genre.

On sait que M. Ch. Richet est en France un des premiers médecins qui ait scientifiquement étudié le magnétisme animal. Dès l’année 1875, il publiait dans le Journal de l’anatomie et de la physiologie de M. Robin un article sur le somnambulisme provoqué, dans lequel, après avoir démontré la réalité de ces phénomènes et l’impossibilité d’admettre la simulation, il établissait les faits essentiels. L’étude du somnambulisme a pris depuis, on ne l’ignore pas, une très grande extension, en France surtout sous l’influence du professeur Charcot, et en Allemagne sons celle de Heidenhain et de Preyer. Toujours est-il que l’on doit à M. Richet d’avoir mis hors de doute l’existence réelle du somnambulisme provoqué, en même temps qu’il attirait l’attention sur ces phénomènes. On trouvera dans le livre dont il est ici question l’exposé complet et la réfutation de la thèse, si longtemps soutenue, de la simulation (voy. pp. 152-170 et p. 511). Et qu’on ne croie pas que toute cette discussion, instituée par M. Richet en 1875 et qu’il a développée dans les pages citées ci-dessus, était inutile. Un an avant le mémoire publié dans le Journal de M. Robin, c’est-à-dire en 1874, l’article Mesmérisme du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales ne s’attachait-il pas à montrer qu’il n’y avait qu’imposture ou aveugle crédulité dans le somnambulisme ? M. Richet a définitivement tranché la question de la simulation. Les raisons qu’il donne, mises à côté des preuves expérimentales imaginées par M. Charcot et ses élèves (voy. surtout P. Richer, thèse sur l’hystéro-épilepsie, Paris, 1879), ne peuvent être contestées.

Mais M. Ch. Richet n’a pas seulement le mérite d’avoir engagé les physiologistes et les cliniciens dans l’étude positive du somnambulisme. Il a vu nettement la plupart des phénomènes physiologiques et psychiques qui dépendent de cet état et il les a soumis à une pénétrante analyse.