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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Charles Richet. — L’homme et l’intelligence, 1 vol.  in-8o, VII-570 pp. Paris, F. Alcan, 1884.

On a dit bien des fois que l’un des principaux caractères de notre époque, c’est un puissant esprit et une extrême ardeur d’analyse. Cet esprit est particulièrement visible dans les sciences positives. De là viennent tant de monographies sur mille sujets divers et tous ces travaux dont le titre seul suffit à indiquer la nature, « essais » ou « contributions ». On a compris qu’il n’y avait pas de meilleure voie à suivre pour l’établissement de la science que l’exacte observation et la réunion abondante des faits ; étude qui, pour être précise et féconde, doit être détaillée. Mais là justement il y a un danger ; car, puisqu’il est certain que les détails ne valent qu’en vue des généralités, suivant une forte expression de M. Renan, au milieu de cette quantité de matériaux, on risque, quand il s’agit de tenter une synthèse, d’être incomplet et par suite inexact. Le jour n’est peut-être pas très loin où la science trouvera à ses recherches un sérieux obstacle dans la bibliographie, maintenant déjà si touffue. Aussi faut-il rendre grâces aux savants qui consentent à recueillir à un moment donné en un seul ouvrage les études qu’ils ont faites dans un même ordre de questions et qu’ils avaient dû disséminer d’abord dans différents journaux ou revues ; s’ils ne la font pas complètement, ils préparent au moins la synthèse, outre qu’ils simplifient la tâche de ceux qui les suivront. — A ce travail d’ailleurs, le public scientifique n’est pas seul à gagner, et l’auteur profite aussi, dont une œuvre acquiert l’importance convenable, par cela seul que toutes les parties en sont coordonnées.

C’est un livre de ce genre que M. Charles Richet a récemment publié sous ce titre : L’Homme et l’intelligence, en réunissant plusieurs articles parus dans cette Revue même et dans la Revue des Deux-Mondes. Le sous-titre : Fragments de physiologie et de psychologie indique qu’il a voulu surtout mettre là son œuvre de psychologie expérimentale.

On jugerait mal ce livre si, consultant la table des matières, on le croyait dépourvu d’unité : sans doute à côté d’une étude sur la douleur en vient une sur les causes du dégoût ; puis il s’agit des poisons de l’intelligence, puis, très longuement, du somnambulisme, puis de hystérie rapprochée de la démonomanie du moyen âge, et l’ouvrage se termine par un appendice de plus de cent pages. Cette dernière partie,