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vante ; et cette puissance doit devenir d’autant plus remarquable qu’il exerce ses fonctions avec plus d’énergie et d’activité. Nous ne pouvons donc plus être embarrassés à déterminer le véritable sens de cette expression, Influence du moral sur le physique ; nous voyons clairement qu’elle désigne cette même influence du système cérébral, comme organe de la pensée et de la volonté, sur les autres organes dont son action sympathique est capable d’exciter, de suspendre et même de dénaturer toutes les fonctions. C’est cela ; ce ne peut être rien de plus. »

Nous remplaçons aujourd’hui l’action sympathique par l’action motrice ; nous nous faisons une idée plus nette et plus positive des rapports du cerveau avec les organes, mais il n’en est pas moins vrai que Cabanis avait raison. Écoutons maintenant Gratiolet qui a pu avoir sur la question des idées plus approfondies et dont nous pourrions reproduire ici de nombreuses et intéressantes pages sans sortir de notre sujet.

« La tendance au mouvement qui suit une sensation véritable, dit-il[1], est une tendance nécessaire ; de plus, toute réaction étant, en principe, proportionnelle à la stimulation, cette tendance produit des actes effectifs. Une tendance pareille résulte de ces impressions intuitives qui sont du domaine de l’imagination… À la sensation correspondent des mouvements achevés, mais l’imagination n’amène en général que des indices d’action auxquels nous donnons le nom de mouvements symboliques. Les mouvements symboliques ne sont point des phénomènes accidentels, ils se développent d’une manière nécessaire et dans un détail infini… Il ne faut point les confondre avec d’autres mouvements qui se développent dans des circonstances très diverses, et auxquels on peut donner le nom de mouvements sympathiques. Ces mouvements résultent des relations qui existent entre tous les organes et les enchaînent l’un à l’autre par des correspondances infinies… Les mouvements symboliques sont l’expression visible des mouvements et des désirs de l’imagination. » Plus loin, Gratiolet ajoute :

« L’influence de l’imagination sur les mouvements du corps demeure démontrée. Cette influence s’exerce dans un détail infini : elle régit à la fois les appareils de la vie animale et ceux de la vie organique, et, par des correspondances inconnues, meut la machine entière à l’insu de l’esprit. Il est impossible à l’âme d’agir indépendamment du corps… L’influence des mouvements de l’imagination sur les sympathies viscérales n’est pas moins évidente. »

  1. Loc. cit., p. 584.