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formés sont les plus sujets aux désordres (Hughlings Jackson) ; et que l’esprit est composé de sensations et d’intelligence ; que les premières sont les matériaux dont la seconde est formée (Herbert Spencer). — L’auteur applique sa thèse au délire, au rêve, aux états produits par les anesthésiques.

Mais ces termes « centres supérieurs », et « centres coordonnateurs les plus élevés » que signifient-ils ? Ces centres étant eux-mêmes hypothétiques, en un certain sens, leur situation doit nécessairement l’être encore plus ; cependant, nous avons quelques faits qui peuvent nous indiquer une direction à suivre. Herbert Spencer a montré que les sensations et sentiments (feelings) correspondent à des changements moléculaires dans les corpuscules nerveux, les rapports entre ces feelings à des changements moléculaires dans les fibres qui relient ces corpuscules. Mais dans le cours de l’évolution, les éléments relationnels se sont coordonnés en une série de centres, et des centres de coordination impliquent des cellules nerveuses. Il doit y avoir dans la couche corticale une série de centres coordinateurs correspondant au système connectif du cerveau. Ce système existe-t-il ? Il faut en tout cas le chercher dans la couche corticale, seul siège de l’intelligence, comme distincte de la pure sensibilité. Dans cette couche qui se décompose en cinq, la première n’est pas de nature ganglionnaire, la seconde et la troisième ont très probablement une fonction sensitive, la quatrième une fonction motrice (les trois ensemble représentant un mécanisme sensori-moteur) ; la cinquième, celle des cellules fusiformes, est propre à la corticale. Meynert a montré depuis longtemps qu’elle appartient à un système de connexions dans le cerveau : c’est donc une hypothèse qu’on peut risquer que cette couche sert aux éléments relationnels, c’est-à-dire intellectuels de l’esprit, Et comme il est extrêmement probable que la totalité du cerveau est représentée dans les lobes frontaux, on peut admettre que dans cette région se trouvent, non toutefois d’une manière exclusive, les plexus développés les derniers, ceux qui sont affectés dans la manie.

Ch. Mercier. La Base de la conscience, réponse à Cleland (dont l’article a été analysé, t.  XVI, p. 443). — Cleland affirme que la conscience a été entièrement localisée dans une partie définie et invariable de l’encéphale. C’est là une assertion gratuite, [fausse et que Mercier nie in toto. Lewes, sans parler de beaucoup d’autres, n’a-t-il pas écrit un ouvrage, Physical Basis of Mind, pour étendre la conscience non seulement à la moelle et aux nerfs, mais à tout l’organisme ? Cieland dénature complètement la thèse de ses adversaires. Non seulement la psychologie moderne ne postule pas un siège défini pour la conscience, mais elle n’admet pas même qu’elle soit une fonction des hémisphères ou de toute autre partie du système nerveux. « Elle n’est pas du tout une fonction et, n’étant pas une fonction, elle ne peut avoir ni siège ni localisation. » Comment, se demande Cleland, la conscience pourrait-elle agir sur des muscles ? et il déclare le problème insoluble. Il ne faut