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MANOUVRIER. — la fonction psycho-motrice

tives et déréglées, résultant d’un relâchement analogue des cellules accumulatrices de la moelle à la suite d’une altération pathologique dont la nature n’est pas ici en question. Dans la chorée, on a mis en cause des lésions de centres médullaires, mais on est obligé d’admettre aussi un certain désordre cérébral. Cette maladie en effet s’accompagne d’une perte plus ou moins grande de la mémoire, de l’attention, de la volonté, de l’intelligence. En outre, le désordre des mouvements disparaît pendant le sommeil et, au début de la maladie, on observe généralement une insomnie prolongée.

Quoi qu’il en soit, la perte de la mémoire, de l’attention, de la volonté constitue un symptôme commun dans toutes ces maladies convulsives ou à décharges cérébrales, et la décharge la plus brusque, la plus intense et la plus généralisée, la décharge épileptique, s’accompagne d’une perte absolue de la conscience. Il semble que cette propriété cérébrale soit le résultat de la transformation, dans les cellules corticales supérieures, de la force nerveuse accumulée dans des cellules voisines, que cette transformation exige une certaine tension préalable dans les centres accumulateurs, tension permettant aux courants intra-corticaux de s’établir jusque dans les couches les plus élevées, siège des éléments cellulaires les plus jeunes, les moins fréquemment mis en activité et, par suite, les plus susceptibles de conscience. S’il en est ainsi, on conçoit que les écluses inférieures se trouvant plus ou moins subitement et plus ou moins complètement ouvertes, il en résulte une chûte de la tension nerveuse, un affaiblissement ou une abolition des courants supérieurs, agents des phénomènes de conscience. Or la volonté, la mémoire ne sont autres choses que des formes de la conscience, la première étant la conscience volitive ou conscience produite par des courants centrifuges assez inaccoutumés, la mémoire étant la conscience produite par des courants renouvelés.

Quant à l’attention, ou peut la concevoir, en suivant le même ordre d’idées, comme résultant aussi d’une tension suffisante de la force nerveuse, de l’accumulation de celle-ci en quantité suffisante et de la fermeture suffisante, en quelque sorte, de ses voies d’écoulement. Dans ces conditions, des courants cérébraux supérieurs peuvent s’établir et dans des directions diverses et durer assez longtemps pour que des associations, des combinaisons complexes aient le temps de se produire. Mais si les voies d’écoulement centrifuge sont anormalement ouvertes, la possibilité d’être attentif, de réfléchir, disparaît d’autant plus complètement que la déperdition de force nerveuse est plus considérable.

D’après cette théorie, on voit que si la volonté, conformément aux