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reste la volonté que l’on peut appeler actuelle. Or cette volonté n’est autre chose, croyons-nous, que la conscience d’un excès de tension nerveuse en un point du cerveau ou, si l’on veut, la conscience d’un courant cérébral centrifuge tendant à se produire, accompagnée de la représentation des phénomènes consécutifs ou supposés devoir suivre l’émission du courant.

Cette manière d’envisager la volonté permet d’établir un parallèle entre elle et la conscience qui accompagne l’arrivée, des courants centripètes. Celle-ci, que nous appellerons conscience sensitive, est nette et vive lorsqu’elle est produite par des courants nerveux non habituels ou suivant un trajet non habituel. Il en serait de même de la conscience volitive produite par un excès de tension nerveuse en un point du cerveau où l’émission d’un courant est inaccoutumée. Dans le cas où cette tension persisterait, il y aurait ce que l’on appelle une volonté énergique, un effort de volonté. — La conscience sensitive est plus ou moins nette lorsqu’elle est produite sous l’influence de courants cérébraux suivant une voie fréquentée : une conscience volitive modérée accompagnerait de même les courants cérébraux centrifuges qui vont inciter des mouvements très fréquents, tels que ceux de la marche. Il arrive, dans ce cas, que la volonté ou conscience volitive ne se produit qu’au début du mouvement. Celui-ci une fois commencé, l’incitation cérébrale peut continuer : rein ne prouve qu’elle ne continue pas conjointement avec l’incitation médullaire automatique ; mais alors elle se continue inconsciemment, par la double raison que le courant cérébral centrifuge est continu et qu’il tend à diminuer de plus en plus la tension cérébrale qui a donné lieu, primitivement, à la conscience volitive du courant dirigé vers les membres, autrement dit, à la volonté de marcher. — Enfin, la conscience sensitive ne se produit plus sous l’influence des courants nerveux continus ou très fréquents tels que ceux qui proviennent des viscères sains : la conscience volitive disparaîtrait également dans les cas où les courants cérébraux centrifuges sont très habituels. On peut ranger parmi ces derniers ceux qui vont inciter les mouvements ou les fonctions quelconques des organes de la vie végétative. L’action des courants envoyés par ces organes au cerveau et l’action réactionnelle du cerveau sur les mêmes organes, toutes deux très indirectes et probablement très faibles, seraient également inconscientes. Ce n’en est pas moins l’étude de cette double action qui viendra éclaircir bientôt la question si importante des rapports « du physique et du moral ».

Nous sommes obligé, sur la frontière indécise de la physiologie et de la psychologie, de nous avancer un peu plus loin que ne le