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REVUE GÉNÉRALE. — la connaissance mathématique

défaut de profondeur, ou reproche à l’auteur de n’avoir pas été assez concis au risque de devenir obscur.

Je désirerais donner une analyse circonstanciée de cet ouvrage, dont Je considère l’importance comme exceptionnelle. Il me sera difficile d’en faire réellement apprécier les qualités, car je ne pourrai présenter à mes lecteurs qu’un sommaire de chapitres, sans aucun des développements qui seraient indispensables ; j’espère au moins arriver à faire connaître fidèlement le plan général et les principales opinions de l’auteur.

L’introduction est destinée à faire connaître le but, les moyens, la condition fondamentale de la connaissance. Une première partie, consacrée à la connaissance apriorique et aux sciences formelles, c’est-à-dire à la mathématique (arithmétique et géométrie) et à la logique, traite spécialement de la distinction des jugements analytiques et synthétiques, de l’intuition et de la généralisation mathématique, ainsi que des axiomes. La seconde partie concerne la connaissance empirique et les sciences réelles  ; elle étudie en particulier l’origine, la valeur et le domaine du principe de causalité, le caractère de la liaison causales des principes, des lois et des concepts fondamentaux de la physique, et aborde enfin les notions de l’espace et du temps.

La tendance de l’homme vers la connaissance a son origine évidente dans l’effort naturel pour la conservation personnelle ; le but de la connaissance est la construction d’un système universel d’affirmations et de prévisions dont la justesse soit manifeste.

Comme sujet connaissant, l’homme est en possession du pouvoir de former des représentations, de les reproduire, de les varier et de les juger ; c’est ce qu’on appelle la perception, le souvenir, l’imagination, la raison. Ces moyens ou armes de la connaissance nous sont innés, ce qui veut dire simplement qu’au moment de sa naissance l’homme les possède au moins en germe, qu’il ne les acquiert pas plus tard à une époque déterminée de sa vie.

La pensée consiste à imaginer et à juger en se proposant un but déterminé et d’après des règles précises ; ainsi ce n’est point une faculté simple et originaire, elle est complexe et acquise ; ce n’est pas une nouvelle arme de la connaissance, c’est l’activité même de la connaissance.

Toute pensée est un travail sur des représentations ou des images ; une pensée vide d’intuition est une fiction de philosophe ; le mathématicien, pour penser à l’opération la plus abstraite, a besoin de se la représenter par tel ou tel symbole, de même que toute notion usuelle se symbolise dans une image représentée devant la cons-