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SUR LE MODE D’ACTION DE LA MUSIQUE


« C’est une question aussi importante que curieuse, écrivait Euler à une princesse d’Allemagne, pourquoi une belle musique excite en nous le sentiment du plaisir. Les savants sont bien partagés là-dessus. » Depuis l’année 1760, où ces lignes ont été écrites, on a continué à discuter, sans arriver à aucune théorie qu’on puisse appeler définitive, car aucune n’a obtenu encore un assentiment général. Cette multiplicité d’explications, dont chacune doit répondre à des faits réels, nous permet de reprendre la question sans trop de témérité, du moment que notre ambition n’est pas de formuler une théorie parfaite, mais seulement d’appeler l’attention sur certains faits qu’on paraît avoir négligés.

Quel que soit le phénomène que l’on étudie, si l’on veut éviter les vues systématiques et incomplètes, il est nécessaire d’en analyser tous les éléments. Or le phénomène musical comprend un élément physique, un élément physiologique et un élément psychique : il suppose en effet un ébranlement de la matière qui nous entoure, une excitation nerveuse se transmettant jusqu’au cerveau et enfin une sensation.

Dans l’étude de ces éléments du phénomène musical, nous serons amené à rappeler des faits connus de tous : nous le ferons aussi sommairement qu’il nous sera possible ; mais il paraît indispensable de bien préciser la nature de chaque fait, avant d’essayer à en tirer aucune conclusion.

L’élément fondamental de la musique, celui que l’on trouve dans les manifestations primitives de l’instinct musical chez les peuples barbares, c’est le rhythme, ou la division du temps d’une façon cadencée par des sons quelconques ou même de simples bruits. Les sons se distinguant les uns des autres par la qualité que l’on appelle la hauteur : la mélodie est née de la succession de sons différents. Enfin la superposition de sons simultanés distincts a produit l’harmonie.

Lorsque les physiciens ont étudié les sons, ils ont reconnu d’abord