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La conscience de la conscience de la vision de la couleur = la conscience du troisième degré n’existe pas, etc., etc.

Et, pour conclure : « Le développement de la conscience montre donc que la conscience entendue au sens de réalité est assez compliquée pour être invraisemblable. »

Enfin citons quelques conclusions de l’auteur :

« 1o La conscience mentale embrasse des expressions qui ne signifient rien.

« 2o Les mots de la conscience mentale signifient quelque chose de réellement existant en tant qu’ils se signifient eux-mêmes comme mots.

« 3o Cogito, ergo sum (ens cogitans) est exact en ce sens qu’il veut dire : « Cogito » dicendum, ergo sum ( « cogito » dicens). »

Nous sommes convaincu que M. Stöhr a écrit tout cela de très bonne foi, et que c’est peut-être là le fruit d’un travail long et sérieux. Mais quelle étrange impression on ressent à sa lecture ! M. Stöhr est un peu trop sûr de lui-même. On se sent mal à l’aise en face de cette imperturbable confiance en l’importance de son rôle qui se trahit à chaque ligne, non seulement dans les ambitieuses excuses et la mélancolique résignation de la Préface, mais dans le luxe étonnant de divisions et de subdivisions, choquant en un si petit nombre de pages, dans la sécheresse tranchante du ton, dans le dogmatisme autoritaire de l’exposition, dans la forme pleine d’une assurance excessive où sont énoncées des idées les unes entièrement inintelligibles, les autres comprises, disposées, juxtaposées, déduites d’une manière qui déroute entièrement là meilleure volonté du lecteur.

L. H.

Riehl (A). Ueber wissenschaftliche und nichtwissenchaftliche Philosophie. (Philosophie scientifique et philosophie non scientifique). In-8o, Fribourg et Tubingue, Mohr, 1883.

Quelle idée le savant épris de la recherche positive doit-il se faire d’une science comme la philosophie, sans cesse renversée jusque dans ses fondements et sans cesse rétablie sur de nouveaux principes, qui n’a jamais pu déterminer nettement sa définition et sa tâche, bien loin de faire admettre de tous une seule de ses notions. Quel est donc le côté faible de toutes les philosophies, l’erreur première qui à toujours engendré toutes leurs erreurs et leurs oppositions ?

La philosophie a eu de tout temps une prédilection trop grande pour la forme systématique. Elle a eu, chez tous ses représentants, la prétention étrange de juger et de diriger l’œuvre des sciences particulières, du haut de son échafaudage de notions soi-disant absolues et nécessaires, et fière de cette connaissance intime de l’essence des choses où elle a cru atteindre. Ainsi, avec des systèmes factices de