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ANALYSES. — SIEBECK. Geschichte der Psychologie.

Dans une intéressante introduction sont passées en revue les premières conceptions des peuples indo-germaniques relatives à l’opposition et aux rapports de l’âme et du corps. De même que l’interprétation scientifique de la nature ne marque pas le début de la pensée, la science de l’esprit, elle aussi, a été précédée par des intuitions spontanées et irréfléchies qui en ont préparé l’avènement, La différence, vaguement entrevue, de la perception intérieure et de la perception externe, amena de bonne heure la croyance à la dualité essentielle de l’être humain, Ajoutez que l’inertie du corps frappé de mort dut autoriser à regarder l’âme comme un hôte qui s’en éloigne. Aussi l’âme s’opposa-t-elle au corps ; elle parut même capable de s’en séparer accidentellement pour errer à l’aventure pendant le sommeil, les songes ou l’évanouissement. Les recherches d’ethnologie et de linguistique nous montrent cette conception dualiste partout répandue à l’origine de la pensée. Les preuves abondent dans les croyances des races inférieures et les légendes populaires de l’Allemagne, de la France et des pays slaves. — C’est dans le monde grec que la psychologie commence à prendre corps.

Première partie. Les commencements de la psychologie avant Socrate et les sophistes. — Les différentes questions agitées pendant cette période sont ramenées à quatre, et chacune d’elles fait l’objet d’un chapitre spécial. Quelles ont été d’abord les principales conceptions relatives à l’essence de l’âme chez les philosophes grecs antérieurs à Socrate ? Il nous est impossible, et nous le regrettons, de résumer, même sommairement, chacune des théories exposées et discutées. Parmi les Ioniens, on voit naître déjà l’opposition des tendances hylozoïstes et matérialistes. Après Héraclite et Empédocle, le matérialisme s’accentue avec Leucippe et Démocrite. Les premières formes du matérialisme en Grèce sont issues en effet de l’insuffisance du monisme hylozoïste incapable de donner du monde et des choses une explication vraiment une. L’intervention même de facteurs divers, comme la dilatation et la condensation, ne suffisait pas à expliquer le passage d’une qualité à une autre, au sein d’une essence divine unique. Empédocle le premier eut recours à des éléments mécaniques, la matière et la force, et, renonçant à l’idée d’un principe unique, s’efforça d’éviter la contradiction d’une conception à la fois spiritualiste et naturaliste des choses. L’atomisme reprit cette tentative avec plus de succès et entreprit de tirer l’élément spirituel (das seelische) d’une matière première, aidée du seul mouvement. Dans tous ces systèmes monistes ou dualistes, l’âme est un produit des facteurs dont se forme le monde, aussi bien dans son ensemble que dans les individus qui le composent. — Les Eléates, les anciens Pythagoriciens, Anaxagore, Diogène, reprennent le problème et le résolvent à leur manière.

Le second chapitre présente une étude nouvelle sur les commencements de la psychologie médicale et sur les rapports de la médecine et de la philosophie dans les temps anciens. On connaît cette