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ANALYSES. — W. WUNDT. Experimentelle Psychologie.

reusement, ces connaissances sont encore dans un état si modeste, que la psychologie expérimentale pourra attendre longtemps. Ces données ne sont pas, cependant, à dédaigner. De nos jours, l’anatomie pathologique, les études sur les maladies du langage et en général les travaux de la psychiatrie contemporaine ont livré des résultats importants ; mais l’interprétation de beaucoup de ces résultats est difficile justement à cause de l’insuffisance des connaissances psychologiques.

L’auteur insiste sur l’importance des recherches relatives à la durée des actes psychiques, recherches qui ont été exposées ici même tout récemment ; aussi n’y reviendrons-nous pas.

Mais, objectera le métaphysicien, en supposant toute cette science achevée, en saurons-nous plus long sur l’essence de notre âme ? Assurément non, tout d’abord. Les découvertes de Képler et de Galilée ont rendu possible à Newton la découverte de la gravitation, et, n’y eut-il eu aucun Newton, on n’en serait pas moins parvenu tôt ou tard à une théorie de la gravitation. Vraisemblablement, la psychologie a encore bien longtemps à attendre pour que cette comparaison soit vraie ; mais n’est-il pas indubitable que des hypothèses appuyées sur une connaissance exacte des faits sont préférables à toute autre ?

Toutes les recherches que nous avons passées en revue jusqu’ici ne s’appliquent qu’à l’homme adulte, développé. Elles ne nous disent rien de l’évolution des diverses formes de la vie psychique. On a pensé qu’à cet égard l’observation des enfants pouvait beaucoup nous apprendre. C’est là une opinion que l’auteur déclare ne partager qu’en partie. Il est certainement intéressant d’établir à quelle période de la vie certaines manifestations psychiques paraissent pour la première fois, en quelle mesure elles sont indépendantes des impressions extérieures, etc. Mais il y a là, bien plus qu’on ne le pense, matière à illusion. Que de fois ne prend-on pas pour une invention de l’enfant une idée ou un mot qui n’est qu’une réminiscence ! Ainsi le langage des enfants, tant étudié dans ces derniers temps, n’est que le langage des mères et des nourrices, quand elles cherchent à s’adapter à l’enfant.

Au premier abord, on peut croire que le vaste domaine de l’anthropologie psychique peut fournir davantage. La vie, les mœurs, la religion des peuples sauvages offrent une matière à la recherche objective ; mais l’état psychique de ces peuples est le résultat de conditions si complexes qu’elles échappent à l’œil de l’observateur d’où il arrive que l’ethnologue qui veut résoudre cette énigme part au contraire des idées courantes ; aussi il est douteux que jusqu’ici on ait tiré de tous ces documents un seul fait de psychologie pure. On pourrait, cependant, en tirer des indications d’un haut intérêt psychologique, sur les conceptions mythologiques ; quoiqu’il y ait moins à attendre des cosmogonies grossières des peuples sauvages que des monuments mythologiques des peuples civilisés. Ce sont des résultats