Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 13.djvu/668

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
664
revue philosophique

avec raison percevoir et observer. La perception est toujours incomplète et livrée au hasard.

M. Wundt reprend les objections qu’on a fait si souvent valoir contre l’observation de soi-même par soi-même, et il compare les psychologues de ce genre à Münchhausen essayant de sortir de son étang en se tirant par sa propre perruque. Le vrai caractère de l’observation, c’est que son objet soit aussi indépendant que possible de l’observateur : ce qui ne se peut en psychologie. Ce qu’on peut conseiller de mieux au psychologue subjectif, c’est de laisser là l’observation intérieure et d’attendre du hasard ce que la perception interne lui fournira de curieux.

Mais la psychologie expérimentale, que veut-elle mettre à la place ? Là où l’observation est impuissante, l’expérimentation est-elle possible ? Peut-elle dépasser les sens et les organes moteurs, que la physiologie revendique pour elle-même ? — Bornons-nous à attirer l’attention sur deux points : 1o Il n’est pas nécessaire que la recherche expérimentale produise des changements directs dans son objet ; mais on peut procéder par des changements indirects dans les conditions dont il dépend. 2o Nous sommes obligés d’élargir nos idées scientifiques, lorsque nous les étendons à un nouveau domaine : il en est de même des méthodes. C’est ce qui arrive, en fait, pour la psychologie expérimentale, pour laquelle nous devons élargir l’idée qu’on se fait d’ordinaire de la méthode expérimentale.

Lorsque nous voulons soumettre nous-même ou d’autres hommes à l’expérimentation, il est clair que nous ne pouvons atteindre directement que le corps. Originairement, tous nos états de conscience dépendent d’impressions corporelles, et en ce sens la lumière qui frappe nos yeux, le son qui frappe nos oreilles sont des expériences instituées par la nature. On ne peut nier en tout cas que ces expériences diffèrent de l’observation intérieure par une circonstance capitale : c’est qu’elles sont indépendantes de la conscience et qu’elles ne se laissent pas travestir. L’auteur rappelle les procédés employés par les psycho-physiciens ils sont connus de nos lecteurs. Si les résultats obtenus par ces procédés sont de nature mixte, on peut néanmoins par une expérimentation convenable distinguer les influences psychiques des influences physiques.

Si nous nous élevons ensuite de la sensation à la perception, c’est-à-dire à une sensation rapportée à un objet en dehors de notre conscience, nous constatons que les mêmes procédés sont applicables.

Mais les phénomènes de la vie psychique centrale ne sont pas encore atteints associations fortuites ou ordonnées logiquement, sentiments, volitions. On doit remarquer tout d’abord que ces états dépendent de ceux qui ont été déjà étudiés, et l’on peut au moins espérer quelques résultats des expériences ultérieures. On a soutenu que, l’observation intérieure étant exclue, la mécanique du système nerveux et la physiologie cérébrale pourraient beaucoup nous instruire. Malheu-