Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 13.djvu/658

Cette page n’a pas encore été corrigée


NOTES ET DOCUMENTS


SUR QUELQUES ILLUSIONS OPTIQUES DE MOUVEMENT


Sans contester d’une manière absolue la loi ou, pour parler plus exactement, l’hypothèse à l’aide de laquelle Thomson[1] a essayé de rendre compte de certaines illusions optiques de mouvement, je crois possible d’en présenter une explication plus simple et plus vraisemblable. Je laisserai de côté tout ce qui est du domaine de l’expérimentation physiologique, comme pouvant paraître exceptionnel et d’une vérification difficile, et m’en tiendrai aux faits de l’expérience commune, que chacun peut aisément constater. La valeur d’une explication ne dépend pas nécessairement du nombre des faits auxquels elle s’applique : rien ne prouve à priori que des faits similaires n’aient point des causes différentes. Je me garderai donc de prétendre expliquer tout un ordre de faits lorsque je me borne à en étudier quelques-uns, et le seul reproche précisément que j’ai à adresser à Thomson, c’est d’avoir généralisé hâtivement et érigé en règle l’exception.

Nul doute qu’une succession prolongée d’images qui se répètent rapidement ne soit une cause de fatigue pour la rétine, et cette fatigue le point de départ de certaines illusions. Faut-il en conclure que la fatigue de la rétine est dans tous les cas la raison déterminante, l’antécédent constant de l’illusion ? Si quelques faits semblent autoriser cette conclusion, d’autres la condamnent formellement. Je n’en vois guère que deux qui leur soient favorables : la chute d’une cascade et le passage d’un train, ou, ce qui revient au même, le passage apparent des objets lorsqu’on se trouve soi-même dans un train en marche, en voiture, en bateau, etc. ; et encore dans ce cas l’illusion se produit-elle souvent sans qu’il y ait fatigue de la rétine. Pour renverser le système de Thomson, il suffit de remarquer que des trois circonstances auxquelles il attribue la fatigue de la rétine :

  1. Voir la Revue philosophique, décembre 1881, p. 554.