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A. ESPINAS. — études sociologiques en france

sécrétion, qu’aucune nécessité n’oblige à se fusionner, en supposant qu’ils aient été primitivement distincts. « Dans une ville qui se fonde et se développe, c’est à la construction des égouts que l’on songe en dernier lieu, et c’est seulement quand la civilisation est avancée qu’on arrive à les réunir en un réseau unique qui devient ainsi un véritable organe social. » (p. 669.).

C’est précisément ce qui est arrivé chez tous les animaux. « Les vers et les animaux analogues présentent cette étrange particularité que la cavité viscérale de leur corps communique avec l’extérieur par autant de paires d’orifices que le corps possède d’anneaux. » Ces orifices sont des appareils de sécrétion ; on les a appelés organes segmentaires par excellence. Ils sont unis la plupart du temps aux organes reproducteurs ; mais ils peuvent aussi s’en séparer, sans cesser d’en être voisins. « Ces organes ne se rencontrent pas seulement chez les vers annelés proprement dits, c’est-à-dire les Annélides, les Lombriciens et les Sangsues ; on les retrouve, avec une remarquable persistance de forme et de fonction dans tous les types dont les affinités avec les vers ne sont pas douteuses, depuis les Rotifères et les Gastérotriches jusqu’aux Bryozoaires, aux Brachiopodes et aux Mollusques. »

Ils se retrouvent également chez les vertébrés inférieurs[1]. Chez les jeunes requins et les poissons voisins, chaque segment vertébral possède son rein particulier exactement construit comme celui de l’annélide. La seule différence est que chez les requins un canal commun recueille sur son trajet les produits sécrétés par les différents reins segmentaires ; mais la même différence existe entre les appareils respiratoires d’insectes d’ailleurs fort voisins ; ce léger progrès de concentration ne change rien aux traits essentiels de la structure observée. Les poissons cyclostomes (Myxines et Lamproies) ont un appareil uro-génital semblable à celui des plagiostomes ; les batraciens de même, bien qu’avec une complication un peu plus grande. Mais voici qui est décisif. Dans l’embryon des reptiles, des oiseaux et des mammifères, le rein est remplacé par un organe voluminens, le corps de Wolf, qui occupe des deux côtés toute la longueur de la cavité viscérale. Il est résorbé plus tard au profit des organes génitaux. Mais son existence dans les premières phases de la vie embryonnaire témoigne hautement de la parenté qui unit les vertébrés supérieurs aux poissons plagiostomes, et ceux-ci aux annélides. « C’est un véritable certificat d’origine. » De plus, l’embryon

  1. Semper, Die Stammesverwandschaft der Wirbelthiere und Wirbellosen, travaux de l’Institut zoologique de Wurzbourg, t. II, 1875 et 1876-1877.