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A. ESPINAS. — études sociologiques en france

les Méduses se séparent de la colonie quand les ressources manquent et que la vitalité générale diminue. Mais le même état, voisin du dénuement, ne leur donne-t-il pas naissance pour la même raison, comme on voit les arbres épuisés produire beaucoup de fruit ?[1] La question demande à être examinée de plus près, et M. Perrier rendra service à la science en exécutant les épreuves de vérification qu’il indique. Il n’est pas un littérateur ; il a en main tout ce qu’il faut pour résoudre les problèmes ; on éprouve quelque regret à l’entendre avouer en plusieurs endroits qu’il n’a fait que concevoir telle ou telle expérience, peut-être décisive.

3o Restent les Coralliaires.

Ils sont bien connus ; mais l’étude qu’en fait M. Perrier est renouvelée par un ingénieux développement des vues de Moseley sur leurs rapports avec les polypes hydraires. « Les Millépores, les Stylaster, les Distichopores et les nombreux Zoophytes voisins récemment découverts par M. Moseley nous montrent le chemin qu’ont suivi les Hydraires pour se transformer en Coralliaires et nous conduisent pas à pas, sans sauter une seule étape, des premiers aux seconds. » Les dépôts calcaires qui semblent caractériser ceux-ci ne sont pas même une différence capitale, car on les trouve déjà dans une hydre d’eau douce, le Cordylophora lacustris.

De ce point de vue, la formation des Coralliaires a consisté essentiellement en ce que les dactylozoïdes de certains hydraires, auparavant disséminés sans ordre et sans nombre fixe non loin du gastrozoïde, sont venus se ranger de plus près autour de lui et ont dû par cela même adopter des positions régulières en même temps que leur nombre devenait invariable. Ainsi est né le calice immuable des coralliaires. Il ne faut donc pas s’étonner si la comparaison d’un de leurs individus pris dans son ensemble avec une hydre n’est plus possible ; « la cavités du sac stomacal, les cavités des tentacules et des loges sont les cavités digestives d’antant de polypes hydraires. » Quant à la cavité centrale, elle n’est un individu à aucun degré, selon M. Perrier. Que faut-il penser à ce point de vue du polypier tout entier, du système vasculaire surtout, de cet appareil circulatoire si complexe qui fait Le lien physiologique de tous les individus partiels ? M. Perrier ne le dit pas. Il allègue notre ignorance touchant la véritable nature de l’axe des Pennatules (Alcyonnaires) ; mais l’axe des

  1. Duclaux, Ferments et maladies (Masson, 1882) montre que divers organismes microscopiques, les mucors, les ferments du lait et les microbes du sang de rate donnent des spores quand les conditions d’existence deviennent difficiles pour eux ; pp. 57, 80 et 130. Les pisciculteurs font peiner, dit-on, dans des bacs étroits les poissons dont ils veulent obtenir une abondante progéniture.