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A. ESPINAS. — études sociologiques en france

ment sur un stolon suspendu à la surface de l’eau par une vésicule remplie d’air. « Que les polypes situés à l’une des extrémités de la tige se développent en Méduses locomotrices, en même temps que la vésicule aérienne disparaît, que les polypes situés plus bas produisent chacun, tout en se modifiant eux-mêmes plus ou moins, une ou plusieurs Méduses sexuées, nous passons aussitôt de la forme rhizophyse à la forme diphye on galéolaire. Puis une division du travail se fait dans chaque groupe ; l’une des méduses devient exclusivement locomotrice ; les méduses sexuées se développent alors plus ou moins : nous arrivons au Praya. Dans tous ces types, la personnalité de la colonie est fort peu développée. Chaque groupe s’est constitué en un village à peu près indépendant de ses voisins ; de telles colonies sont de simples confédérations. Les Agalmes et les types voisins, tels que les Apolémies et les Stéphanomies, s’élèvent déjà plus haut sur l’échelle des individualités. Chaque groupe ne peut plus se suffire à lui-même ; la faculté de locomotion se centralise d’une façon complète. Les méduses sexuées arrivées à maturité peuvent bien parfois se détacher ; mais elles n’aident en rien au transport de la colonie, et ce sont les cloches natatoires.… qui accomplissent seules cette fonction. Il en résulte nécessairement une dépendance plus grande de tous les individus ; des liens plus intimes s’établissent entre eux ; les impressions produites sur une partie quelconque de l’ensemble, au lieu de s’étendre sur un support fixe, doivent nécessairement être transmises aux cloches locomotrices ; les mouvements de celles-ci se coordonnent… Il naît donc une sorte de conscience coloniale ; par cela même, la colonie tend à constituer une unité nouvelle ; elle tend à former ce que nous nommons un individu. Cette individualité s’accuse davantage chez les Physophores, où le tronc commun se raccourcit, où tous les individus (préhenseurs, nourriciers, hépatiques, sexués) se rassemblent de manière à former une sorte de bouquet qui s’épanouit au-dessous des cloches natatoires ; elle est encore peut-être plus développée chez les Physales. » (p. 262.) Les Porpites et les Vellèles viennent couronner ce processus. Et qu’on ne croie pas que cette longue série de modifications soit l’effet d’une liaison théorique arbitrairement établie entre des phénomènes disparates ; l’embryon des siphonophores la reproduit, er l’abrégeant, dans ses phases essentielles.

Ces individus ramenés par le consensus physiologique au rang d’organes sont tous des hydres diversement modifiées. Nous sommes en présence d’ensembles composés d’individus déjà composés eux-mêmes ; et l’élément, au lieu d’être mono-cellulaire comme chez