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LE MONISME EN ALLEMAGNE


Les systèmes que le réveil de la spéculation philosophique à fait surgir en Allemagne depuis une quinzaine d’années semblent s’accorder pour revendiquer le nom et défendre les principes du monisme.

Ce n’est pas que le nom ni l’idée qu’il exprime soient des nouveautés philosophiques, aussi incontestables qu’il paraît au premier abord. Il faut faire remonter l’invention du mot jusqu’à Wolff, auquel la terminologie philosophique de l’Allemagne a tant d’autres obligations.

Quant à l’idée qu’il traduit, l’opposition au dualisme de la tradition spiritualiste, n’est-elle pas le principe commun et de Spinoza et de Leibniz, et de tout l’idéalisme transcendant qui aboutit à Hegel ?

Ce serait se tromper gravement néanmoins que de croire qu’il n’y a rien de nouveau dans le monisme. Le Changement des noms, dans l’histoire des doctrines comme ailleurs, est toujours l’indice de la transformation des idées.

Sans doute les monistes d’aujourd’hui soutiennent avec Spinoza, avec Leibniz par exemple le grand principe de l’unité ou de l’identité de l’Être. Ils croient que le mouvement et la pensée sont partout présents dans l’univers ; qu’il n’y a entre les éléments de la réalité que des différences de degré, non de nature. Mais, tandis que les métaphysiciens du passé affirmaient ces principes comme des vérités à priori qui devancent, qui guident et complètent l’expérience toujours incertaine et défectueuse, nos modernes philosophes les présentent avec confiance comme les plus hautes généralisations, comme les suprêmes conclusions de la science. Ils ne revendiquent pour eux que l’autorité des faits et croient, en les faisant reposer sur le solide fondement de l’expérience, leur communiquer la certitude démonstrative, qui leur avait fait défaut jusque-là.

Être moniste, c’est donc substituer la science à la métaphysique dans l’explication dernière des choses ; c’est appliquer la science aux problèmes que la métaphysique s’était réservés jusqu’ici et assu-